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~ Séminaires de littérature ancienne ~ Présentation et programme des séances, 2010-2011 |
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Les séminaires se tiennent à l’université de Provence, Centre Schumann, le mercredi de 16h à 19h, salle C137
Séminaire « Fictions rustiques, fictions rustres » :
On se représente souvent la littérature classique comme une littérature de cour et de salons dont « la magnificence et la galanterie » ne laisseraient guère de place à l’exposition brute du réel. Relégués aux confins de l’espace de la représentation, le paysan et plus généralement le rustre n’y seraient introduits qu’à la condition d’une transformation radicale, d’abord sous la forme des bergers de l’idylle et de la pastorale, puis dans la perspective idéologique d’un retour à l’état de nature. Pourtant la rusticité classique ne saurait être enfermée dans le vase clos d’un monde fictionnel de pure convention. Le roman comme le théâtre du XVIIe et du XVIIIe siècles, et parallèlement à eux toute une littérature « hors-genre » avec laquelle ils interfèrent plus ou moins (fables, pamphlets, mazarinades, almanachs), travaillent à restituer la singularité de la langue et des mœurs du paysan, au moment même où ils se codifient dans la littérature noble, dans le sens d’une réduction de cette singularité. C’est dans cette tension que se développe le réalisme classique, qui n’est pas le réalisme balzacien; c’est elle aussi qui traduit la contestation politique, à l’époque de la Fronde comme dans la période révolutionnaire. L’expression rustre, comme la fiction rustique, même lorsqu’elle se présente comme écart par rapport à une norme fictionnelle (le roman de chevalerie, la littérature galante, le langage précieux, ou même honnête), tend alors à se constituer elle-même comme contre-norme et à délimiter, sinon les contours d’un genre (roman bourgeois, comédie larmoyante, roman sensible, nouvelle révolutionnaire...), du moins des figures topiques intermédiaires, entre réel et fiction. Le séminaire poursuivra ainsi la réflexion entamée l’an dernier sur la fiction classique, et sur les rapports d’entrelacement qu’elle entretient avec le réel.
Séminaire « Littérature et sciences dans la culture médiévale et moderne »
La distinction contemporaine entre un discours ou une méthode scientifiques d’une part, un imaginaire de la fiction ou un usage littéraire de la parole d’autre part n’avait pas de sens dans la culture médiévale et moderne. Ce que nous appelons aujourd’hui littérature a toujours eu une ambition scientifique, de la poésie scientifique de Lucrèce à l’utopie et à la science-fiction en passant par les sommes et les encyclopédies. Réciproquement, la fiction a pu informer certaines opérations scientifiques : modélisation de l’expérience, imagination de l’hypothèse, enchaînement du raisonnement. De même, dans son effort pour se doter d’un appareil conceptuel, la critique littéraire recourt souvent à la science, soit qu’elle cherche une homologie entre le discours scientifique et le discours littéraire à une époque donnée (Michel Serres pour Lucrèce, Leibniz ou Emile Zola, Pierre Bourdieu pour Flaubert ou Pascal, Jean Starobinski pour Diderot...), soit qu’elle emprunte aux théories ou aux champs scientifiques les plus récents certains concepts ou méthodes qu’elle applique à l’étude des œuvres littéraires (Darwin pour l’histoire littéraire, la linguistique pour le structuralisme, la physique quantique pour le déconstructionnisme...). Certains écrivains ont même pu supposer une continuité profonde entre les lois constitutives du réel et celles de l’imagination : en plein XXe siècle, les rêveries et les spéculations de Roger Caillois sur les pierres ne sont pas loin de celles que développe Du Bartas au XVIe siècle lorsqu’il établit une analogie entre la dynamique du monde physique et celle de la création poétique. On réfléchira sur ces différentes interférences entre un discours ou un modèle scientifique, par nature thétique (qui produit une affirmation théorique), et un discours ou une pratique littéraire, normalement non thétique (fictionnel, ludique, expressif...). On se demandera ce que produit cette interférence, entre rêverie et système, entre modélisation affirmée et dispositif enfoui. Car c’est peut-être dans cette interférence que se noue la constitution d’un champ littéraire. Pour consulter le programme 2009-2010, cliquer ici. |