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Pour citer ce texte : Stéphane Lojkine, « Molière, une parole débordée », atelier du Séminaire national des lettres, Les Métamorphoses de la lecture : lire, écrire, publier à l’heure du numérique, novembre 2011.
Ce travail a également fait l’objet d’une conférence à l’université Bar-Ilan le 28 décembre 2011.
Molière, une parole débordée
Comment faut-il enseigner Molière ?
Traditionnellement, on choisit une pièce, dont on explique le
texte. Mais le monde de
Molière, ce n’est pas une
pièce ; et ce théâtre, plus peut-être que tout autre, ne
saurait se réduire à un texte,
sans sa représentation. L’expérience pédagogique dont cet exposé
est le fruit a tenté de résoudre cette double difficulté.
Molière a été très
tôt illustré. L’édition du recueil de ses pièces a donné lieu,
entre le XVIIe et le XVIIIe siècle, à trois grandes séries
d’illustrations, d’abord d’après les dessins de Brissart en
1682, puis d’après ceux de Boucher en 1734, enfin d’après ceux
de Moreau le Jeune en 1773. Ces séries ont elles-mêmes été
copiées, détournées, adaptées, de sorte qu’on se trouve devant
un corpus d’images important. Mais le principe est toujours le
même : chaque pièce donne lieu à une illustration, qui
renvoie à une scène donnée, même si, par rapport à cette scène,
l’illustrateur peut prendre certaines libertés.
Une image par pièce,
mais toutes les pièces : aborder Molière par son illustration
oblige à une approche synthétique. Mais surtout, c’est de mise en
scène qu’il faudra parler : Brissart a très certainement vu
Molière jouer, ce sont des décors réels qu’il dessine ;
Boucher évolue dans un tout autre monde, de pastorales galantes et
de romans rococo ; Moreau le Jeune revient à la scène, mais,
un siècle plus tard, dans un contexte théâtral complètement
renouvelé, et alors qu’une tradition iconographique s’est
constituée, avec laquelle il lui faut dialoguer. Les dessinateurs
créent des mondes, dont le texte de Molière n’est qu’une
dimension. Aborder Molière par l’image permet d’aller à la
rencontre de ces mondes.
L’enjeu
pédagogique de cette expérience devient alors également un enjeu
scientifique. Fondamentalement, l’image est transgénérique :
de la tragédie à la farce, du jeu d’acteurs au théâtre à la
scène de peinture ou de roman, le dispositif visuel circule,
emprunte, détourne, contrefait. Il révèle alors, au-delà des
stratégies du dessinateur, un certain rapport de Molière à la
scène de roman, un rapport d’appropriation et de renversement, à
partir duquel se déploie le jeu verbal. Depuis ce rapport, il est
alors possible de faire retour vers le texte, pour tenter de
comprendre ce qu’engage, pour Molière, l’usage de la parole, et
le débordement (irrépressible et catastrophique) de cette parole
vivante depuis la parole morte du texte écrit. On se propose ici, à
partir de trois exemples, de dégager, en partant des images, ce qui
permet de définir la parole de Molière comme une parole débordée.
I. Topique de l’intimité surprise : Dom
Garcie de Navarre
 Molière, Dom Garcie de Navarre, gravure de Laurent Cars d’après François Boucher pour l’édition de 1734 des œuvres de Molière, Versailles, Bibliothèque municipale centrale On dirait que le couple s’embrasse à
bouche-que-veux-tu, il se reflète dans le trumeau d’une glace
composite, dont on distingue le quadrillage, les jointures. L’ample
robe de la princesse, avec sa traîne, ses franges, ses plis, force
son partenaire à se pencher en avant, se cambrer, s’étirer pour
l’atteindre. A droite au fond, un témoin décomposé observe
l’étreinte depuis le seuil de la pièce dont il regrette déjà
d’avoir écarté le rideau. On distingue son compagnon derrière
lui, dans l’ombre.
Dom Garcie de Navarre est le prince jaloux,
étouffant Elvire de ses soupçons ombrageux. On lui a d’abord
remis une lettre déchirée, qu’il a interprétée comme une
déclaration d’Elvire à son rival dom Sylve (II, 4) : Elvire
l’a détrompé en lui donnant à lire la lettre complète, qui lui
était destinée. Puis il a surpris Elvire en tête-à-tête avec dom
Sylve (III, 3) et n’a pas voulu croire à son arrivée inopinée,
et qu’il était éconduit. Enfin, alors qu’il s’apprête à
entrer sur scène en compagnie de son confident dom Alvar, il croit
voir « Un homme dans les bras de l’infidèle Elvire » (IV,
7, 1241). L’amant jaloux surprend la princesse infidèle, et
déploie le dispositif scénique depuis son regard, qui fait
effraction dans une intimité à lui interdite. Le regard du jaloux
est barré par le rideau, arrêté au seuil de la scène, qu’il
méconnaît : depuis l’arrière de la robe, depuis le dos
d’Elvire, Dom Garcie interprète mal l’intimité qu’il surprend
et qui fait tableau pour nous, contre lui.
Car ce qui se joue ici n’est pas du tout ce
qu’il croit. Un détail s’offre à notre regard, que, de la
coulisse où il se tient en retrait, il ne peut pas voir :
l’homme dans les bras de l’infidèle Elvire porte une boucle
d’oreille ; son visage lisse est celui d’une femme, de Done
Ignès qui a revêtu l’habit de cavalier pour échapper à ses
poursuivants en se faisant passer pour morte (IV, 4) :
« Il
faut cacher à tous le secret de mon sort, Pour me
voir à l’abri de l’injuste poursuite Qui pourrait dans ces lieux
persécuter ma fuite. » (v. 1163-5)
L’étreinte coupable de l’amante infidèle
s’avère un baiser innocent entre deux princesses solidaires dans
la persécution. Il n’y avait rien à voir que le fantasme d’un
mythomane fou de jalousie, il n’y a pas de scène réelle.
Par un tour de force de Boucher au dessin, et de
son graveur Laurent Cars, le couple embrassé se reflète dans le
miroir. Ce reflet n’a pas d’utilité pratique dans le dispositif
scénique : accessible au seul spectateur-lecteur de la gravure,
il ne donne à voir que le revers de l’étreinte, qui nous est
livrée frontalement. La boucle d’oreille disparaît, le flou de la
glace irrégulière, la fente des carreaux ajointés au point de
rencontre des visages, les deux bougies encadrant le couple brumeux
comme une consécration de scandale, les deux pigeons de boiserie
dorée se béquetant, dessinent le fantasme de Dom Garcie, et
figurent pour nous ce qu’il croit voir au lieu de ce que nous
voyons.
Au-dessus du couple factice, un portrait en
bas-relief dans le style romain est suspendu, signifiant le style
noble de la tragédie : et de fait le personnel de Dom Garcie
de Navarre est le personnel de
la tragédie, avec princes, princesses, confidents, confidentes,
royaumes à pourvoir et couronnes usurpées.
Et de fait cette scène
n’est pas, n’est plus une scène de théâtre : on ne peut
la rapporter à aucun moment scénique réel de la pièce. Lorsque,
au début de la scène 7 de l’acte IV, Dom Garcie croit voir
Elvire dans les bras d’un homme, c’est Dom Garcie qui se trouve
sur scène et c’est Elvire qu’il faut supposer dans les coulisses
ou à leur seuil. Dom Garcie ne survient pas ; il était déjà
là à la scène 6, assurant Élise, la confidente d’Elvire, des
bonnes résolutions qu’il avait prises contre sa jalousie, en
disgraciant le courtisan qui l’entretenait :
« Dis lui que j’ai d’abord banni de ma
présence Celui dont les avis ont causé mon offense, Que
Dom Lope jamais… »
A la scène 7, la vision est déjà passée :
le dialogue qui s’instaure entre Dom Garcie et son confident Dom
Alvar est la représentation de son contre-coup :
« Que
vois-je ô justes Cieux ! Faut-il
que je m’assure au rapport de mes yeux ? Ah !
Sans doute ils me sont des témoins trop fidèles, Voilà
le comble affreux de mes peines mortelles, Voilà le coup
fatal qui devait m’accabler » (v. 1222-1226)
 Nicolas Lancret, La Servante justifiée, 1735-9, huile sur cuivre, 27,9x35,6 cm, New York, The Metropolitan Museum of Art Sur scène, au théâtre, Molière n’a pas prévu
que nous voyions ce que Boucher dessine, du moins que nous le voyions
comme un tableau. Le héros tragique qu’est Dom Garcie est habité
par une vision sans représentation, vision qu’il communique au
public par une parole débordée, submergée par le fantasme qui
l’étreint. Boucher ne dessine pas la scène théâtrale de ce
débordement, mais le roman de ce fantasme.
C’est une scène impossible : le miroir
reflète ce que dom Garcie a pu entrapercevoir, mais depuis l’endroit
où il surgit Dom Garcie ne peut voir le miroir. Elvire a pu donner
l’accolade à Done Ignès dans un mouvement d’amitié et de
compassion, mais ce baiser abandonné, égaré, cette cambrure et cet
enlacement ne représentent pas une réalité possible de
l’événement ; ils actualisent le fantasme de Dom Garcie.
Même la boucle d’oreille n’est pas un signe absolu de féminité
dans le code vestimentaire du début du XVIIIe siècle.
Le texte de l’édition de 1734 tente de combler
ce hiatus de la scène au roman en ajoutant, au début de la scène 7
une didascalie : « Dom Garcie, regardant par la porte
qu’Élise a laissée entrouverte ».
Mais, rappelons-le, c’est Dom Garcie qui est sur scène, et Élise
en partant lui permet à la rigueur d’apercevoir Elvire au dehors.
 Astolphe et Joconde surprennent la reine avec son nain. Gravure de Romeyn de Hooghe pour les Contes de La Fontaine, éd. 1685 Boucher retrouve
ainsi le dispositif central de la scène de roman, hérité de la
nouvelle : la voisine épiant le mari qui batifole avec sa
maîtresse dans son jardin, dans La Servante justifiée ;
Joconde surprenant la reine avec son nain, dans l’Arioste et chez
La Fontaine ; Valville surprenant M. de Climal aux pieds de
Marianne dans le roman de Marivaux. Ce dispositif, Molière l’a
renversé en en faisant un fantasme : Dom Garcie croit que les
choses se passent comme dans les romans, il croit voir une scène de
roman et fait l’expérience d’une sorte de déception romanesque.
Le théâtre se nourrit de cette mise à l’épreuve, de cette mise
en échec du roman.
 Molière, Dom Garcie de Navarre ou Le Prince Jaloux, gravure de Jean Sauvé d’après Pierre Brissart, Les Œuvres de M. de Molière, Paris, Barbin, Thierry et Trabouillet, 1682. Versailles, Bibliothèque municipale centrale La gravure originale de 1682, de Jean Sauvé
d’après un dessin de Pierre Brissart, a visiblement servi de
modèle à Boucher, qui ne travaille donc pas directement à partir
du texte de Molière, et n’a pas pu voir jouer la pièce :
créé en 1661, Dom Garcie
n’eut aucun succès et, après quelques représentations en 1662 et
1663, la pièce disparut. La gravure de Brissart représente
le même moment de la pièce, mais dans le sens de la représentation
théâtrale : Dom Garcie est au centre de la scène, et fait
office de médiateur ; au moment où il quitte Élise, au
premier plan à gauche, il aperçoit dans le corridor, au fond, au
troisième plan, Elvire en situation équivoque. La représentation
insiste sur l’habile enchaînement des deux scènes, sans solution
de continuité. Les acteurs sont répartis sur trois plans, que
délimite à gauche l’ouverture de la porte et au sol le dallage :
Élise se tient contre la porte ouverte, Dom Garcie dans l’ouverture,
Elvire et Ignès près des fenêtres. À la limite, ils font partie
du décor : dans la gravure de Jacobus Harrewijn, l’effet
est encore plus net ; les deux silhouettes se découpent sur les
croisillons de plomb de la fenêtre, derrière laquelle se dessine
l’espace vague de la ville. Elles font tableau comme pièces de
décor, c’est-à-dire comme objets et non comme sujets de la
représentation théâtrale. De cette capture du fantasme dans le
faire tableau d’une représentation quadrillée subsiste chez
Boucher le reflet sur le trumeau, dont les jointures des carreaux de
verre s’estompent, se fondent. La différence s’efface entre le
lieu de la scène et le tableau de la vision.
Pourquoi cette vision de Dom Garcie, qui ne se
manifeste que dans l’interstice de deux scènes, est-elle choisie
comme emblème pour la pièce ? Toute la pièce est habitée par
un dysfonctionnement de la parole : il faudrait que Dom Garcie
se taise, se contrôle, se renferme en lui-même ; mais la
parole inquisitrice, le questionnement jaloux ne peuvent s’empêcher
de jaillir. Dom Garcie pose, au seuil de la production théârale de
Molière, une parole débordée à laquelle correspond une image
débordée, un fantasme en lieu et place de la scène, un tableau
fugitif aussitôt décadré. On voit alors apparaître le mécanisme
de la scène moliéresque, comme coïncidence d’un débordement de
parole et d’un débordement de tableau, jouant pour ce débordement
avec les codes et les topiques d’une représentation instituée,
qu’il convoque et qu’il retourne. Boucher récupère comme modèle
ce que Molière avait ménagé comme interstice fantasmatique :
cette récupération, cette institution romanesque du débordement
scénique théâtral consacre le basculement et l’universalisation
transgénérique de la scène comme medium de la représentation.
 Molière, Dom Garcie de Navarre, gravure d’Antoine-Jean Duclos d’après Jean Michel Moreau le Jeune, Œuvres de Molière, éd. Bret, Paris, Cie des Libraires associés, 1773. Versailles, Bibliothèque municipale centrale. Le dessin de Moreau le jeune dans l’édition de
1773 est le commentaire de l’impossibilité théâtrale de la scène
dessinée par Boucher : depuis la scène, Dom Garcie prenant à
témoin Dom Alvar ne peut désigner qu’une porte entrouverte et
vide. Le tableau d’Elvire étreignant un inconnu ne saurait prendre
une consistance visible et ne tient que dans, par la parole délirante
du Jaloux. La scène de théâtre ouvre sur un vide, le vide de la
chambre tragique, qu’en 1773 on peut représenter comme vide. Le
temps n’est plus à l’unification du medium scénique et à
l’insistance sur la fluidité des transitions de scènes, comme
chez Brissart un siècle plus tôt. Triomphante, la scène se referme
sur elle-même et fait apparaître sa faille de silence et
d’invisibilité, par laquelle va se détricoter toute la substance
de la représentation classique.
II. Le commentaire du texte tue le texte :
leçons du Misanthrope
L’échec de
Dom Garcie engage Molière à
rompre nettement avec le modèle tragique. Mais la matière de Dom
Garcie va nourrir toute son
œuvre ultérieure, et notamment Le Misanthrope.
La gravure originale de Sauvé d’après Brissart représente à
gauche un homme élégant, portant l’épée de gentilhomme et une
abondante perruque, tenant sous le bras un chapeau de plumes fourni
et à la main des gants garnis de dentelle. La dentelle déborde
également de ses manches, tandis qu’il esquisse une gracieuse
révérence à l’attention de son antagoniste. Le personnage de
droite, dont on peut identifier la figure à celle de Molière même,
est l’exacte antithèse de l’avenant courtisan : à
l’entrechat gracieux de gauche s’oppose l’ennui engoncé de
droite, un homme petit, replié sur lui-même, mal assis sur le coin
de sa chaise, dérangé.
 Molière, Le Misanthrope, gravure de Jean Sauvé d’après Pierre Brissart, 1682, Versailles, Bibliothèque municipale centrale. Le texte du
Misanthrope indique
sobrement que « la scène est à Paris » : mais la
présence de la chaise et le plafond à caissons ornés nous font
comprendre que nous sommes à l’intérieur d’une maison, malgré
le luxe pompeux du décor du fond, qui fait penser à la façade d’un
palais. La gravure est généralement interprétée comme illustrant
la première scène de la pièce, entre Alceste et Philinte.
« Qu’est-ce donc ? Qu’avez-vous ? » demande
Philinte à son ami Alceste, le misanthrope, qui se dérobe en lui
répondant « Laissez-moi, je vous prie ».
Je ne crois pas
que cette identification soit exacte. « Laissez-moi là, vous
dis-je, et courez vous cacher », s’exclame Alceste : le
texte donne le sentiment d’une première scène en mouvement,
Alceste est furieux, exalté, il poursuit Philinte de sa colère, il
est debout, et la chaise n’aurait là aucune justification
scénique. Face à Alceste, Philinte n’est pas le courtisan
enrubanné, mais l’ami de
cœur, modéré, parlant avec franchise, et non au milieu des
courbettes. Un autre frontispice d’une édition anglaise, signé de
Gerard Vander Gucht, représentant le même salut courtisan
d’un côté, la même posture de refus courroucé d’Alceste
depuis sa chaise porte d’ailleurs l’indication explicite « Act
1st Scene 2d ». Le graveur, qui a copié Brissart comme le
trahit la disposition inversée, a donc interprété le personnage
élégant non comme Philinte, mais comme Oronte venant lire son
sonnet à Alceste et quêter son approbation :
 Alceste dérangé par Oronte, gravure de Gerard Vandergucht, Oxford, Ashmolean Museum « J’ai su là-bas
que, pour quelques emplettes Éliante est sortie, et
Célimène aussi ; Mais comme l’on m’a
dit que vous étiez ici, J’ai monté pour vous
dire, et d’un cœur véritable, Que j’ai conçu pour vous une estime
incroyable » (I, 2, v. 250-4)
Oronte vient d’entrer, il débite son compliment
de courtisan, il n’a pas encore sorti son sonnet de sa poche ;
contrairement à Oronte, Alceste est déjà en scène, il vient juste
de s’emporter, à sa fureur contre son ami Philinte succède la
mélancolie et l’abattement. Pour cette raison, il s’est assis,
il est épuisé et souhaiterait rester seul. Oronte arrive dans son
dos et le surprend :
« C’est à vous,
s’il vous plaît, que ce discours s’adresse. En cet endroit
Alceste paraît tout rêveur, et semble n’entendre pas qu’Oronte
lui parle. À moi,
Monsieur ?
 Molière, Le Misanthrope, gravure de Laurent Cars d’après François Boucher, 1734, Versailles, Bibliothèque municipale centrale Le geste
d’Alceste, dérangé dans son abattement mélancolique, correspond
à ce « À moi ». Dans la gravure d’après Boucher, le
décor pompeux a disparu : Oronte avance timidement derrière
Alceste, dont le visage détourné (c’est exactement le moment du
« À moi ») vient s’inscrire sur le trumeau du miroir,
entre les deux baies vitrées. Le miroir, qui fait écho à celui de
Dom Garcie, ne reflète
rien : l’esprit d’Alceste est vide. Le vide du miroir, très
légèrement quadrillé par les jointures des carreaux qui le
composent, figure l’absorbement vide d’Alceste, abstrait de
l’espace social où il est assis.
Chez Boucher,
Alceste n’est plus dérangé au coin de sa chaise : il est
assis en maître, croisant les genoux avec nonchalance, un plaid
froissé derrière lui. Près de la fenêtre, il médite, on le
dérange. Derrière les carreaux, ce n’est pas Paris mais un parc
qui se devine. Alceste préfigure déjà ces portraits de Carmontelle
où la physionomie est saisie dans le négligé d’un instantané
sans apprêt, où le cadre de la scène tombe et l’espace s’ouvre
sur l’ailleurs et le vague d’un site. Alceste écoute, Oronte
attentif guette sa réaction : c’est une conversation de
boudoir, comme on en trouve, au moment où Boucher dessine, chez
Marivaux et chez Crébillon. Mais Alceste
est installé à l’envers, tournant le dos à son visiteur au lieu
de lui faire face : par cet envers, Boucher donne à voir
immédiatement l’intention scénographique de Molière, qui suppose
un rituel de sociabilité et le retourne: comme le souligne Philinte
à la scène suivante, Oronte venait simplement pour être flatté,
il n’était pas question ici qu’Alceste donne sincèrement
son avis sur le sonnet. Toute la tension dramatique de la scène 2
repose sur cet écart du rituel attendu avec ce qu’Alceste retient,
puis délivre finalement : une parole sincère incongrue, qui ne
peut s’empêcher de déborder.
« Monsieur, je suis mal propre à décider la chose ; Veuillez m’en dispenser. — Pourquoi ? — J’ai le défaut D’être un
peu plus sincère en cela qu’il ne faut. » (v. 298-300)
Alceste
se défend pied à pied contre la catastrophe à laquelle le rituel
même de la flatterie le pousse, et suscite un bel esprit imaginaire
pour lui adresser la bile irrépressible de ses remontrances :
« Mais un jour, à quelqu’un, dont je tairai le nom, Je disais, en voyant des vers de sa façon, Qu’il faut qu’un galant homme ait toujours grand empire Sur les
démangeaisons qui nous prennent d’écrire ; »
(v. 341-6)
D’une
certaine manière l’autre imaginaire est le reflet inversé
d’Alceste même, qui depuis sa misanthropie ne peut se représenter
le mondain que comme un homme habité par une parole vaine qu’il ne
peut réfréner : le débordement mondain et le débordement
mélancolique procèdent du même mouvement.
Entre
les deux interlocuteurs, il y a donc cet être imaginaire qu’Alceste
fabrique à son image inversée et où Oronte se reconnaît. Ce qui
fait tableau dans la scène est invisible, porté par la parole
d’Alceste, imagé chez Boucher par le miroir vide, qui joue ici le
même rôle sémiologique que le miroir de l’estampe illustrant Dom
Garcie.
 Molière, Le Misanthrope, gravure d’Antoine Jean Duclos d’après Jean Michel Moreau le Jeune, 1773, Versailles, Bibliothèque municipale centrale Dans
l’édition de 1773, l’estampe gravée par Duclos d’après
Moreau le jeune illustre une scène toute différente, la scène 3 de
l’acte IV, où Alceste, brandissant une lettre de Célimène
décachetée, qu’il pense adressée à Oronte, accuse la jeune
femme d’infidélité. Alceste, à gauche, marche presque sur la
robe de Célimène, qu’il obsède ; celle-ci, qui lui tournait
le dos, se retourne à demi, sa main droite pointant vers le sol un
éventail replié, en signe d’agacement. Entre eux et la porte du
fond, un paravent interposé bloque toute intrusion possible.
Moreau
le jeune ne choisit pas dans le texte une nouvelle scène. Chaque
nouvelle édition illustrée commente les précédentes, interprète
les choix de leurs illustrateurs, adapte ces choix au goût nouveau.
Le choix de l’illustrateur n’obéit pas spécifiquement à une
logique textuelle, mais, plus
globalement, à une logique de dispositif : dans la machine
théâtrale d’une pièce, il s’agit d’isoler un dispositif
scénique qui va représenter l’ensemble de la pièce, et donner
une lisibilité exclusivement visuelle à un ensemble composite, où
entrent un texte avec ses articulations d’intrigue et de
raisonnement, une mise en scène avec ses décors, ses coulisses et
ses éclairages, un jeu d’acteurs avec ses postures et ses gestes,
ses mimiques et ses inflexions de la voix. L’illustration est une
réduction visuelle de cet ensemble, dont le texte n’est qu’un
des éléments.
Le
dessin de Moreau le jeune fait pendant à celui de Boucher :
Oronte s’approchait d’Alceste qui lui tournait le dos, et
prétendait lui lire un sonnet ; Alceste s’approche de
Célimène qui lui tourne le dos, et prétend lui lire une lettre.
Oronte dérangeait Alceste, qui dérange Célimène. Entre Oronte et
Alceste, un texte interposait l’écran d’une présence aussi
invisible qu’importune ; entre Alceste et Célimène, même
écran invisible, même importunité. Narrativement, moralement, les
situations n’ont rien à voir l’une avec l’autre ;
scéniquement, c’est le même dispositif, avec, pour la scène
qu’illustre Moreau le jeune, le mérite de la clarté. Le
dessinateur nous adresse même, si nous y prêtons attention, un clin
d’œil malicieux : ce n’est pas exactement le sol, mais le
siège que Célimène pointe de son éventail, c’est-à-dire
l’endroit depuis lequel, à la scène 2 du premier acte, Alceste
avait insulté Oronte. Depuis Moreau le jeune, Célimène désigne
Boucher, depuis l’image de 1773, elle pointe celle de 1734.
La
scène de la lettre, directement reprise de Dom Garcie de
Navarre, est refermée sur
elle-même par l’illustrateur : à la profondeur vide du
parloir de Brissart, aux fenêtres de Boucher et à la fantasmagorie
ouverte d’un parc se dessinant derrière les croisées succède
l’encombrement d’un boudoir embarrassé de meubles et barricadé
d’un paravent. La marche de la séquence, la transition d’une
scène à l’autre ne produisent plus leur effet de flux :
Alceste bute contre la robe de Célimène qui, de son éventail
pointé au sol, fixe un terme au mouvement. La scène se fige en
tableau, se constitue en modèle fixe, standard, de la
représentation.
Sur
le plan verbal, la scène est tout entière tendue entre le texte de
la lettre, à quoi Alceste voudrait toujours revenir, et le code de
la conversation galante, dont Célimène se fait un rempart. Alceste
voudrait s’en tenir au texte : « Ce billet découvert
suffit pour vous confondre » (v. 1325) ; « Vous
ne rougissez pas en voyant cet écrit ? » (v. 1328) ;
« Tous les mots d’un billet qui montre tant de flamme »
(v. 1354) ; « Ce que je m’en vais lire »
(v. 1356) ; « De
me justifier les termes que voici » (v. 1360). Tout l’art
de Molière consiste à montrer ce qu’il y a, dans le théâtre, de
plus que les mots, qui abusent Alceste. Alceste s’emporte, sa
parole déborde de la lettre qui devait confondre Célimène
simplement parce qu’elle est montrée, au besoin de lire la lettre,
puis au besoin de l’interpréter, enfin, de l’interprétation au
seul éclat des reproches :
« On pousse ma douleur et mes soupçons à bout, On me laisse
tout croire, on fait gloire de tout » (v. 1375-6)
Le
poème, la lettre sont, dans l’image, ce qui du texte, non pas
résiste vers un plus haut sens, mais tout au contraire meurt pour la
représentation d’avoir résisté à sa conversion théâtrale,
spectaculaire, visuelle. À la fin de la scène, Célimène remarque
le visage défait de Du Bois, le serviteur d’Alceste, qui se
présente à la porte pour annoncer à son maître la perte de son
procès, la ruine, le risque de la prison :
« Voici
Monsieur Du Bois, plaisamment figuré. » (v. 1435)
À la
figure de Du Bois, où Célimène méconnaît la catastrophe
extérieure, réelle, correspondent les figures de la lettre, les
« mots », les « termes » que Célimène
refuse d’avouer. Il faut sortir de la figure pour dire le réel ;
mais ce débordement emporte la perte de qui le déclenche et
l’incompréhension de qui le reçoit.
III. Dehors est
dedans : L’École des femmes
Le
projet théâtral de Molière s’inscrit dans cette tension :
d’un côté, l’institution de la parole, les pratiques normées,
policées, ritualisée du langage, le compliment, la galanterie, le
diagnostic, le contrat, qui mentent, déçoivent, résistent,
désignent le socle de la représentation comme socle mort de la
textualité du texte. De l’autre, le débordement de la parole, le
mouvement irrépressible d’expression de ce qui a été contenu,
l’impossibilité de s’empêcher de parler, comme force vive du
jeu théâtral, comme irruption hors norme du caractère, du type :
mais ce débordement n’est pas non plus de vérité, il s’enfle,
se déverse, défigure la parole en folie du langage et se mure dans
le pas-de-sens du délire paranoïaque. Cette tension de la parole
s’incarne dans le dispositif visuel de la scène : depuis la
scène, quelque chose fait tableau, mais comme image interstitielle
(Elvire entraperçue avec Ignès), comme corps et objet du délit :
un sonnet, une lettre, un livre, ridicules, illisibles,
indéchiffrables. Le jeu scénique s’arrête au seuil de cette
image, de cet objet, s’ordonne à partir de cette invisibilité.
Ainsi s’instaure l’écran de la représentation : la scène
donne à voir ce seuil et son au-delà ; elle arrête les
personnages au seuil, elle condamne l’accès à ce qu’ils voient.
Et pourtant cet invisible qu’ils voient constitue le ressort de la
théâtralité.
 Molière, L'École des femmes, gravure de Jean Sauvé d’après Pierre Brissart, 1682, Versailles, Bibliothèque municipale centrale Ressort
tragique à la base, puisque la vision se monnaye contre la folie,
que la visibilité s’obtient au prix du sacrifice. Molière ne
choisit pas simplement d’en rire : là où la tragédie oppose
à l’institution mondaine l’héroïsme aristocratique, Molière
substitue la folie à l’héroïsme. A l’aberration logique du
discours correspond alors une aberration visuelle de la scène, que
répercutent dans une certaine mesure les illustrations.
Pour
illustrer L’École des femmes, Brissart représente, sur la
place de ville type du décor de comédie, Arnolphe assis à droite,
Agnès debout à gauche. Nous sommes au début de la scène 2 de
l’acte III, la didascalie précise qu’Arnolphe est assis :
ARNOLPHE, assis. Agnès, pour m’écouter,
laissez là votre ouvrage. Levez un peu la tête et
tournez le visage : Là, regardez-moi là
durant cet entretien, Et jusqu’au moindre mot
imprimez-le-vous bien.
Arnolphe a posé sur ses genoux un petit
opuscule : ce sont les Maximes du mariage,
qu’il s’apprête à faire lire à Agnès. Face à lui, attentive
et obtuse, Agnès le regarde, comme son mentor lui en intime l’ordre
de l’index de sa main droite, pointé vers son œil. L’espace de
la scène est aberrant : Arnolphe assis parle nécessairement à
l’intérieur de la maison, ou au moins dans son jardin ; mais
par convention la scène de comédie est une place de ville, un
espace public, donc, et extérieur. Le mur de droite, d’où dépasse
une frondaison, désigne par métonymie l’intérieur où il faut
supposer que les choses se déroulent, tandis que les maisons du
fond, en perspective
raccourcie, symbolisent la ville mais ne la représentent nullement
de façon réaliste : les acteurs n’y entreraient pas à
quatre pattes… Entre les façades latérales et le décor du fond,
un espace est ménagé : on peut certes imaginer une rue, mais
pratiquement cet espace est nécessaire pour accrocher les différents
éléments du décors aux portants des coulisses. L’aberration même
de l’espace nous indique
que Brissart n’imagine pas son dessin à partir du texte, mais à
partir d’une représentation réelle, concrète de la pièce au
théâtre.
 Molière, L'École des femmes, gravure de Laurent Cars d’après François Boucher, 1734, Versailles, Bibliothèque municipale centrale Boucher copie
Brissart, comme l’indique la disposition inversée des figures ;
mais il déthéâtralise l’espace de la représentation, ou plus
exactement il le normalise, le ramène aux conventions de la scène
picturale. La place publique a disparu, les personnages sont
disposés dans le patio d’une maison de ville envahie par la
végétation, la perspective linéaire à l’italienne est
rétablie : c’est le décor rococo de la pastorale, familière
à Boucher, et le site d’une scène de roman comme on en trouve par
exemple dans Paméla.
Arnolphe n’est plus dehors : il a remisé son chapeau au coin
du dossier de sa chaise, étalé un plaid sur ses genoux, laissé
couler son dos vers l’arrière ; il est négligé.
Boucher ne
comprend plus le geste d’Arnolphe, intimant de l’index à Agnès
de le regarder, et lui parlant par signes comme si, complètement
idiote, elle était inaccessible au langage. Il déporte donc l’index
de l’œil vers le front du barbon ; parallèlement, le texte
de l’édition de 1734 ajoute la didascalie : « Mettant
son doigt sur son front ». C’est sur son front, qu’Agnès
doit imprimer les
maximes du mariage, ce n’est plus une parole vive qu’on entend,
mais sa traduction visuelle comme texte et comme signe.
Le texte des
Maximes est la parole
instituée qui tente de réduire Agnès : il faudrait pouvoir
expliquer ce texte, le développer, Arnolphe en est sans cesse
tenté : « Je vous expliquerai ce que cela veut dire »
(v. 752), « Je vous expliquerai ces choses comme il faut »
(v. 303). Mais l’expliquer, c’est le pervertir, c’est
donner l’idée, développer l’imagination, ouvrir la possibilité
des transgressions qu’il réprime. Toute la scène est tendue entre
ce texte absurde, incompréhensible pour Agnès, et le débordement
de parole que réfrène Arnolphe. La machine théâtrale moliéresque
tend à identifier le texte à la mort du désir, le pas-de-sens de
la textualité au bâillonnage de la féminité. Le texte interdit
d’écrire à celle qui, outre l’interdiction du commerce galant,
ne doit pas devenir une précieuse : « Il ne faut
écritoire, encre, papier, ni plume »
(v. 781). Entre Arnolphe et Agnès le texte fait écran, comme
lieu de basculement de la parole vive en textualité morte, de la
femme de désir en séquestre du mariage.
Mais cette
tension de la parole restrictive et de son débordement paranoïaque
ne se convertit visuellement en écran de la représentation que chez
Moreau le jeune, qui introduit le troisième terme, manquant, du
désir, Horace comme au-delà du face à face entre Arnolphe et
Agnès. Chez Boucher comme
chez Brissart, la résistance du texte demeure l’interpétant du
dispositif scénique. Pourtant Molière, par la voix d’Horace, y
insiste lourdement : c’est par le dispositif d’écran
qu’Agnès accède au désir.
Certes, Agnès a jeté
un grès à Horace depuis son balcon, mais Horace devine qu’Arnolphe
était derrière elle à lui commander ce geste : de la présence
de ce témoin ordonnateur de l’effraction scénique naît la
jouissance partagée des deux jeunes amants.
« Et j’ai compris d’abord que mon homme était là, Qui, sans se
faire voir, conduisait tout cela. » (III, 4, 394-5)
Horace rejoint ensuite
Agnès dans sa chambre, mais le barbon survient :
« Et tout ce qu’elle a pu dans un tel accessoire, C’est de me renfermer dans une grande armoire. Il est entré d’abord : je ne le voyais pas, Mais je
l’oyais marcher, sans rien dire, à grand pas » (IV, 6,
1152-1155)
Horace caché devient
le voyeur aveuglé, séparé de la scène où se trouvent Agnès et
Arnolphe, et constituant cette scène depuis cette séparation, dans
la terreur et dans la jubilation. Enfin, lorsqu’il revient une
troisième fois, monte à l’échelle et, surpris par ses
assaillants, glisse et tombe, Horace est à nouveau pris dans un
dispositif où il se fait connaître à Agnès tandis qu’il passe
pour mort aux yeux des autres (V, 2).
Agnès a d’abord
écrit une lettre avec le grès qu’elle a jeté ; elle a
ensuite enfermé Horace pour ménager le silence d’Arnolphe ;
elle prend finalement la fuite avec lui : le texte est encore
l’interprétant du dispositif dans la première tentative ; le
silence se fait, mais la vue ne s’établit pas encore dans la
deuxième ; la troisième glisse du récit rapporté sur la
scène théâtrale pour parachever le basculement visuel.
 Molière, L'École des femmes, gravure de Jean-Baptiste Blaise Simonet d’après Jean-Michel Moreau le Jeune, Versailles, Bibliothèque municipale centrale C’est cette
scène que Moreau le jeune décide d’illustrer. La scène
représente l’allée qui conduit à la maison d’Arnolphe, dont on
peut imaginer qu’elle se trouve à gauche, derrière le haut mur
bordé d’arbres. Arnolphe enveloppé dans son manteau pour ne pas
se faire reconnaître d’Agnès
tire celle-ci vers le fond de la scène, tandis que la jeune fille,
retournée vers son amant, résiste, retarde le moment de la
séparation, voudrait exprimer sa tendresse et ses inquiétudes. La
mise en tension scénique est physiquement représentée par ces deux
bras orientés en sens contraire, celui de droite retenu par la main
d’Horace, celui de gauche empoigné, entraîné par Arnolphe.
Moreau le jeune retrouve alors la disposition de la gravure de
Boucher pour Dom Garcie de Navarre.
Nous sommes partis
d’une pièce peu connue, qui nous donnait en quelque sorte la base
topique à partir de laquelle Molière a déployé son talent. Le
jaloux qui doit retenir ses questions, le misanthrope trop sincère,
le barbon qui ne voudrait surtout pas que son oie blanche se fasse
des idées, sont autant de personnages qu’habite un même rapport à
la parole. Ce n’est pas exactement une parole volubile,
débordante ; c’est une parole qui déborde malgré eux et que
la scène objective comme jeu : une parole débordée.
Cette parole vive
qui court à la catastrophe, se focalise, s’attache au texte
qu’elle brandit, qu’elle interroge, qu’elle stigmatise :
c’est une lettre, un sonnet, ce sont des Maximes du
mariage ; ailleurs — un
contrat. La scène désigne, depuis la parole vive, catastrophique,
la parole morte, comme institution de l’artifice, comme mensonge
fondamental du texte. Depuis ce leurre, le théâtre déploie ses
fantasmes, qu’imagent les miroirs de Boucher, la porte béante de
Moreau le Jeune, les hauts-murs de Brissart : la vraie scène,
celle qui hante les personnages, réside donc bien hors scène, dans
le texte. Le tout est, préalablement, de le mettre à mort…
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