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Recherche infructueuse

Hippocrates visiting Democritus - Berchem

Date :
1650
Type of image :
Peinture sur toile
Dimensions (HxL cm) :
67,3x81,3 cm
Storage Location :
Signed work

Description

On trouve une allusion Ă  la folie de DĂ©mocrite dans la lettre LXXIX Ă  Lucilius, §14, oĂą elle est associĂ©e Ă  la gloire discutĂ©e de Socrate : « Quandiu videbatur furere Democritus ! Vix recepti Socraten fama. Â»
La rencontre entre Hippocrate et Démocrite est évoquée dans les Histoires diverses d’Elien (livre IV, §20) :

« Les AbdĂ©ritains appelèrent DĂ©mocrite la philosophie, comme ils appelèrent Protagoras le discours. DĂ©mocrite traitait tous les hommes de fous ; ils Ă©taient pour lui un objet continuel de risĂ©e : de lĂ , il fut nommĂ© par ses concitoyens Gelasinus. On raconte que la première fois qu’Hippocrate le rencontra, il le prit pour un insensĂ© ; mais que dans la suite, ayant eu occasion de le voir souvent, il conçut pour lui la plus haute estime. On ajoute mĂŞme que ce fut en l’honneur de DĂ©mocrite, qu’Hippocrate, nĂ© Dorien, Ă©crivit ses ouvrages en dialecte ionique. Â» (Claudius Aelianus, ou Elien le Sophiste, IIIe siècle de notre ère.)

Mais la source essentielle est la lettre apocryphe d’Hippocrate à Damagète (lettre 17) sur la prétendue folie de Démocrite :

« Il en est, Damagète, comme nous l’avions pensĂ© : DĂ©mocrite ne dĂ©lirait pas ; mais il mĂ©prisait tout, et il nous instruisait et, par nous, tous les hommes. Je t’ai renvoyĂ©, ami, le vaisseau qui est vraiment celui d’Esculape ; au signe du soleil qu’il porte dĂ©jĂ , ajoutes-y la santĂ© ; car il a eu en effet une navigation fortunĂ©e et est arrivĂ© Ă  Abdère le jour mĂŞme que je leur avais dit que j’arriverais. Aussi les trouvai-je rassemblĂ©s devant les portes et m’attendant comme de raison ; non seulement les hommes, mais aussi les femmes, les vieillards, les enfants, les petits enfants, tous, je te le jure, dans la tristesse ; cette tristesse leur venait de ce qu’ils croyaient DĂ©mocrite fou ; et lui, pendant ce temps, Ă©tait tout entier livrĂ© Ă  une philosophie transcendante. En me voyant, ils parurent revenir un peu Ă  eux, et eurent bon espoir. PhilopĂ©men me pressait de me rendre Ă  sa demeure hospitalière, et c’était aussi l’avis des autres. Mais moi : je n’ai, dis-je, Ă´ AbdĂ©ritains, rien de plus pressĂ© que de voir DĂ©mocrite. Ils approuvèrent mon dire, et, joyeux, ils me conduisirent aussitĂ´t Ă  travers le marchĂ©, les uns derrière, les autres devant, d’autres sur les cĂ´tĂ©s, et me criant de sauver, de secourir, de traiter. Et moi je leur donnais bon courage, assurĂ© d’après la saison Ă©tĂ©sienne que sans doute il n’y a aucun mal, ou que, s’il y en a, il est petit et facile Ă  rĂ©parer. Tout en parlant ainsi, je cheminais ; la maison n’était pas loin, et la ville tout entière n’est pas grande. Nous voilĂ  donc arrivĂ©s, la maison se trouvant proche du rempart ; ils me conduisent sans bruit Ă  une colline Ă©levĂ©e qui Ă©tait derrière la tour et qu’ombrageaient des peupliers hauts et touffus. De lĂ  on apercevait le logis de DĂ©mocrite, et DĂ©mocrite lui-mĂŞme assis sous un platane Ă©pais et très-bas vĂŞtu d’une tunique grossière, seul, le corps nĂ©gligĂ©, sur un siège de pierre, le teint très-jaune, amaigri, la barbe longue. Près de lui, Ă  droite, un filet d’eau, courant sur la pente de la colline, murmurait doucement. Sur cette colline Ă©tait un temple consacrĂ©, autant que je conjecturai, aux nymphes et tapissĂ© de vignes nĂ©es spontanĂ©ment. DĂ©mocrite tenait avec tout le soin possible un livre sur ses genoux ; quelques autres Ă©taient jetĂ©s Ă  sa droite et Ă  sa gauche ; et de nombreux animaux entièrement ouverts Ă©taient entassĂ©s. Lui, tantĂ´t, se penchant, Ă©crivait d’une teneur, tantĂ´t il cessait, arrĂŞtĂ© longtemps et mĂ©ditant en lui-mĂŞme. Puis, peu après, cela fait, il se levait, se promenait, examinait les entrailles des animaux, les dĂ©posait, revenait et se rasseyait. Cependant les AbdĂ©ritains, qui m’entouraient, affligĂ©s et bien près d’avoir les larmes aux yeux : Tu vois, me disent-ils, la vie de DĂ©mocrite, Ă´ Hippocrate, et comme il est fou, ne sachant ni ce qu’il veut, ni ce qu’il fait. Et l’un d’entre eux, voulant dĂ©montrer encore plus sa folie, poussa un gĂ©missement aigu semblable Ă  celui d’une femme pleurant la mort de son enfant ; puis un autre se lamenta imitant Ă  son tour un voyageur qui avait perdu ce qu’il portait. DĂ©mocrite, qui les entendit, sourit pour l’un, Ă©clata de rire pour l’autre, et cessa d’écrire, secouant frĂ©quemment la tĂŞte. Et moi : Vous, dis-je, Ă´ AbdĂ©ritains, restez ici ; je veux m’approcher davantage de la parole et de la personne de notre homme, je le verrai, je l’entendrai, et je saurai, la vĂ©ritĂ© du cas. Ayant ainsi parlĂ©, je descendis doucement. Le. lieu Ă©tait roide et en pente ; aussi le pied me manquait et je n’arrivai qu’avec peine. M’étant avancĂ©, j’allais l’aborder, mais je le trouvai Ă©crivant d’enthousiasme et avec entraĂ®nement. Je m’arrĂŞtai donc sur place, attendant que vĂ®nt l’intervalle de repos. Et de fait, lui, ayant peu après cessĂ© de tenir le stylet, m’aperçut qui m’avançais et me dit : Salut, Ă©tranger. Et Ă  toi aussi mille saluts, rĂ©pondis-je, DĂ©mocrite, le plus sage des hommes. Lui, honteux, je pense, de ne m’avoir pas appelĂ© par mon nom : Et toi, dit-il, comment te nommes-tu ? C’est l’ignorance de ton nom qui a Ă©tĂ© cause que je t’ai appelĂ© Ă©tranger. Mon nom, repartis-je, est Hippocrate le mĂ©decin. Il rĂ©pondit : La noblesse des AsclĂ©piades et la grande gloire de ton habiletĂ© dans la mĂ©decine sont venues jusqu’à moi. Mais quelle affaire, ami, t’a conduit ici ? Avant tout, assieds-toi ; tu vois ce siège de feuilles encore vertes et molle, il n’est pas dĂ©sagrĂ©able ; les sièges de l’opulence qui attirent l’envie ne le valent pas. Je m’assis, et il continua : Est-ce pour une affaire privĂ©e ou publique que tu es venu ici ? Parle, et je t’aiderai autant qu’il sera en mon pouvoir. Et moi : A dire vrai, repris-je, c’est pour toi que je viens, dĂ©sireux d’avoir une entrevue avec un homme sage ; et l’occasion a Ă©tĂ© fournie par ta patrie, dont j’accomplis une ambassade. Alors, dit-il, use avant tout chez moi de l’hospitalitĂ©. Voulant tâter mon homme de tout cĂ´tĂ©, bien que dĂ©jĂ  je visse clairement qu’il ne dĂ©lirait pas, je rĂ©pondis : Tu connais PhilopĂ©men, qui est un de vos concitoyens ? Très-bien, reprit-il, tu parles du fils de Damon, qui demeure près de la fontaine HermaĂŻde. De celui-lĂ  mĂŞme, dis-je ; je suis, du chef de nos pères, son hĂ´te particulier ; mais toi, DĂ©mocrite, donne-moi une hospitalitĂ© qui vaut mieux, et d’abord, dis-moi, qu’est-ce que tu Ă©cris lĂ  ? Il s’arrĂŞta un moment, puis il dit : J’écris sur la folie. Et moi m’écriant : O roi Jupiter, quel Ă -propos et quelle rĂ©plique Ă  la ville ! De quelle ville, Hippocrate, parles-tu ? me dit-il. Ne fais pas attention, repris-je, Ă´ DĂ©mocrite, je ne sais comment cela m’a Ă©chappĂ© ; mais qu’écris-tu sur la folie ? Qu’écrirais-je autre chose, rĂ©pondit-il, que sur sa nature, sur ses causes et sur les moyens de la soulager ? Les animaux que tu vois ici ouverts, je les ouvre, non pas que je haĂŻsse les Ĺ“uvres de la divinitĂ©, mais parce que je cherche la nature et le siège de la bile ; car, tu le sais, elle est, d’ordinaire, quand elle surabonde, la cause de la folie ; sans doute elle existe chez tous naturellement, mais elle est plus ou moins abondante en chacun ; quand elle est en excès, les maladies surviennent, et c’est une substance tantĂ´t bonne, tantĂ´t mauvaise. Et moi : Par Jupiter, m’écriai-je, Ă´ DĂ©mocrite, tu parles avec sagesse et vĂ©ritĂ© ; et je t’estime heureux de jouir d’une si profonde tranquillitĂ©, tandis qu’à moi cela n’est pas permis. Il me demanda : Et pourquoi cela ne t’est-il pas permis, Hippocrate ? Parce que, dis-je, les champs, la maison, les enfants, les emprunts, les maladies, les morts, les serviteurs, les mariages, et tout le reste, en Ă´tent l’occasion. LĂ , notre homme, retombant dans son affection habituelle, se mit Ă  beaucoup rire et Ă  se moquer, puis garda le silence. Et moi je repris : Pourquoi ris-tu, DĂ©mocrite? Est-ce des biens ou des maux dont j’ai parlĂ© ? Mais Lui rit encore plus fort ; et, des AbdĂ©ritains qui Ă  l’écart regardaient, les uns se frappèrent la tĂŞte ou le front, les autres s’arrachèrent les cheveux ; car, comme ils le dĂ©clarèrent ensuite, son rire avait Ă©tĂ© plus bruyant que d’ordinaire. Moi je repris : O DĂ©mocrite, le meilleur des sages, je dĂ©sire apprendre la cause de ce qui t’émeut, et pourquoi j’ai paru risible, moi ou ce que j’ai dit, afin que, mieux informĂ©, je cesse d’y donner lieu, ou que toi, rĂ©futĂ©, renonces Ă  tes rires inopportuns... Â» (En français : La ConfĂ©rence et entrevue d’Hippocrate et de DĂ©mocrite, tirĂ©e du grec et commentĂ©e par Marcellin Bompart, Paris, veuve P. Gaultier, 1632, in-8°)

L’anecdote est également rapportée par Robert Burton dans The Anatomy of Melancholy, 1621 :

« …...wherein he doth express, how coming to visit him one day, he found Democritus in his garden at Abdera, in the suburbs, under a shady bower, with a book on his knees, busy at his study, sometimes writing, sometimes walking. The subject of his book was melancholy and madness ; about him lay the carcases of many several beasts, newly by him cut up and anatomised ; not that he did contemn God’s creatures, as he told Iippocrates, but to find out the seat of this atra bilis, or melancholy, whence it proceeds, and how it was engendered in men’s bodies, to the intent he might better cure it in himself, and by his writings and observation teach others how to prevent and avoid it. Â»

History :

1. Signé Berchem.

2. Mis en vente Ă  La Haye le 24 novembre 1744, lot 82 (60 florins) ;
Johan van der Linden van Slingelandt, Dordrecht, vers 1752 ;
mis en vente par Yver et Delfos, Dordrecht, 22 août 1785, lot 15 ; invendu ;
mis en vente sous le mĂŞme nom chez Lamme, Rotterdam, le 12 novembre 1827, lot 1 (vendu 350 florins Ă  van den Berg) ;
M. Pirard, Valenciennes ; mis en vente chez Laneuville et Le Roy, Paris, 20 mars 1860, lot 5 (vendu 1000 francs) ;
Baron Perier Gravenstein ;
Baron Johan von Puthon, Vienne ;
E. Hirschler, Vienne ;
Gaston Ritter von Mallmann, Blaschkow, vers 1902, mis en vente chez Lepke, Berlin, 12 juin 1918, lot 136.
Vente Londres Christie’s 17 déc 1999 n°6234.
Exposé au musée de Dordrecht, fév-mai 2001.
Galerie Jack Kilgore & Co, New York.

3. Cette esquisse de Berchem pourrait avoir été réalisée d’après le tableau achevé (mais beaucoup plus maladroit) de Lastman.

Indexed items :
La scène a un public
Textual Sources :
La Fontaine, Fables (1668-1692)

Technical Data

Notice #004656

Image HD

Past ID :
A3975
Image editing :
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