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Recherche infructueuse

Isabelle & Doria at Justinian's bedside (Ibrahim, ed. 1723, vol. 2)

Description

Justinian a retrouvé Isabelle à Monaco et celle-ci ne demande qu’à l’épouser. Mais il a juré à Soliman qu’il reviendrait auprès de lui et il ne peut se résoudre à emmener Isabelle, qui deviendrait là bas captive en terre Infidèle. Isabelle tombe malade, et Justinian à sa suite. Il veut d’abord cacher sa maladie à Isabelle, afin de lui épargner une peine supplémentaire. Mais dès qu’Isabelle l’apprend, elle se précipite à son chevet :
    « Emilie fit ce qu’elle pĂ»t pour l’empĂŞcher de sortir du lit ; mais ses prieres, ni les conseils des Medecins ne pĂ»rent changer sa resolution. Elle appella ses femmes, se fit donner une cimarre, & se faisant soĂ»te,nir sous les bras, elle fut Ă  l’appartement de Justinian, qu’elle trouva si fort changĂ©, qu’à peine Ă©toit-il connoissable.
    Aussi-tĂ´t qu’il la vit entrer, il fit un effort pour la saluer, mais ne pouvant lever la tĂŞte, il fut contraint de se contenter de tourner les yeux de son cĂ´tĂ©, & d elui dire d’une voix foible & languissante, qui ne pouvoit ĂŞtre entenduĂ« que d’elle, car ses femmes s’étoient Ă©loignĂ©es. Enfin, Madame, la fortune ne nous separera point ; & la mort s’en va faire ce que j’attendois de la cruautĂ© de la premiere. Je mourrai toutefois doucement, puisque j’ai encore le plaisir de vous voir : pourvĂ» que vous me promettiez que vous vivrez pour l’amour de moi ; & que ma memoire vous sera chere. Car je trouve cet avantage dans ma mort, qu’elle m’empĂŞche de vous ĂŞtre infidele. Elle finit le combat de l’amour & de l’honneur, qui ne pouvoient se vaincre en mon ame ; elle fait que je satisfait Ă  tous les deux, [271] & pour tout dire elle nous separe, mais je ne vous quitte pas, & je ne fais en cette occasion que ce que je ne puis m’empĂŞcher de faire. La Princesse ayant le visage tout couvert de larmes, lui rĂ©pondit en soupirant ; je ne suis pas encore si Ă©loignĂ©e du tombeau que je n’y puisse entrer avec vous, si la mort vous y conduit : mais si vous m’aimez, vous ferez un effort pour vivre. Ne songez point Ă  vous conserver, puisque vous en le voulez pas ; mais Ă  me conserver moi-mĂŞme ; & ne croyez point que vous puissiez mourir sans moi. Je vous ai bien fait voir ce que la douleur peut en ma personne, & je n’aurois point besoin ni de poison, ni d epoignard, pour quitter le jour, puisque vĂ´tre seule perte suffiroit pour cela. Ne pensez pourtant pas que je vous parle de cette sorte, par la crainte de mourir ; c’ets un sentiment qui n’est point dans mon ame, & je ne trouve la mort effroyable qu’en la personne aimĂ©e. Ne me faites donc point Ă©prouver une telle douleur : vivez, s’il est possible, & du moins ne me refusez pas d’y apporter ce que vous pourez. Je veux bien vous obéïr, repliqua Justinian ; mais prenez garde que ce ne soit me priver d’un remede que je ne trouverai pas si aisĂ©ment. Comme il vouloit [272] continuer, on vint avertir la Princesse, que Doria ayant sĂ» la maladie de son ami, Ă©toit arrivĂ© au château, & qu’il demandoit Ă  le voir. Les MĂ©decins s’approcherent alors du lit de Justinian, & dirent Ă  la Princesse, que si elle souhaitoit sa vie, il falloit lui donner quelque repos, & ne le laisser voir qu’à peu de monde. Justinian les supplia qu’il pĂ»t embrasser Doria, que l’on fit entrer aussi-tĂ´t : cette entrevûë donna de la pitiĂ© Ă  tous ceux qui la virent : car Justinian parut si constant ; Dotia si affligĂ©, & la Princesse si deseperĂ©e, qu’il eĂ»t Ă©tĂ© impossible de retenir les larmes Ă  un spectacle si funeste.
    Le plus ancien des Medecins s’étant approchĂ© de Justinian, & lui ayant touchĂ© le bras, il trouva que la fiĂ©vre Ă©toit encore augmentĂ©e : & jugea par l’inĂ©galitĂ© de son poulx, que l’agitation d el’esprit avoit redoublĂ© celle du sang & des humeurs. De sorte que s’étant approchĂ© une second fois de la Princesse, il lui dit que ce n’étoit point avec des larmes qu’on pouvoit secourir Justinian : & qu’absolument il falloit qu’elle le laissât Ă  leur conduite, sans le revoir qu’il ne fĂ»t en meilleur Ă©tat. Puisque ma vûë lui est funeste, repliqua la Princesse, il vous faut obéïr ; mais je ne pense pas que ce soit pour longtems [273]. Elle sortit de la chambre de Justinian, après lui avoir encore ordonnĂ© de ne resister point aux remedes, & de se souvenir qu’elle vouloit qu’il vĂŞcut. Â» (Ibrahim ou l’illustre Bassa, Première partie, Livre neuvième)
    Isabelle est reprĂ©sentĂ©e Ă  gauche, mais non pas dans le dĂ©shabillĂ© nĂ©gligĂ© d’une malade, comme l’indiquait le rĂ©cit. Ă€ droite, l’ami Doria fait son entrĂ©e dans la chambre. Au fond, derrière le lit, un mĂ©decin, reconnaissable Ă  son vĂŞtement, prend le poul de Justinian. Le mĂŞme mĂ©decin dessinĂ© une 2e fois prie Isabelle de sortir de la chambre. Le petit chien est un pur ajout dĂ©coratif, que rien ne justifie dans le texte.
    Justinian guĂ©rit et part pour Constantinople, oĂą le Sultan l’accueille avec joie.

History :

2. On distingue sur la gravure (notamment dans la partie supérieure) l’empreinte de celle du 4e vol.

Indexed items :
Lit de mort
Chien
Textual Sources :
Scudéry, Ibrahim, ou l’illustre Bassa (1641)

Technical Data

Notice #006605

Image HD

Past ID :
A5924
Image editing :
Photo numérique
Image Origin :
Collection particulière (Cachan)