Judith et Holopherne - Tintoret
Analyse
Judith, jeune et belle veuve juive, a dĂ©cidĂ© de tuer le gĂ©nĂ©ral assyrien Holopherne qui assiĂšge la ville israĂ©lite de BĂ©thulie. Elle demande Ă Dieu de la guider pour sauver son peuple. Le peintre, dans le style maniĂ©riste propre Ă Tintoret, privilĂ©gie le mouvement, mais alors que la dĂ©capitation dâHolopherne par Judith y suffirait, il faut chercher longuement la tĂȘte pour comprendre que tout est terminĂ©Â et qu'il s'agit en fait de bien autre chose :
« Tous se retirĂšrent de sa prĂ©sence et personne, du plus petit au plus grand, ne resta dans la chambre Ă coucher. Judith, debout prĂšs du lit dâHolopherne, dit en son cĆur : âSeigneur, Dieu de toute puissance, jette un regard en cette heure sur les Ćuvres de mes mains pour lâexaltation de JĂ©rusalem.â [âŠ] Alors, sâavançant vers la barre du lit qui Ă©tait prĂšs de la tĂȘte dâHolopherne, elle en retira son cimeterre et, sâapprochant du lit, elle saisit la chevelure de sa tĂȘte et dit : « Fortifie-moi en ce jour, Seigneur Dieu dâIsraĂ«l. » Elle frappa deux fois sur son cou de toute sa vigueur et elle lui ĂŽta la tĂȘte. Puis elle fit rouler son corps hors de la couche et enleva la moustiquaire des colonnes ; peu aprĂšs, elle sortit et remit la tĂȘte dâHolopherne Ă sa suivante, qui la mit dans sa besace Ă provisions. » (Judith, 13, 4-10, TOB)
La scĂšne est construite pour souligner les diffĂ©rents mouvements. Judith debout au centre du tableau, mĂšne deux actions simultanĂ©es. Dâun cĂŽtĂ©, elle tend un drap sur le corps nu dâHolopherne, dont on ne voit pas sâil a encore sa tĂȘte, elle pourrait ĂȘtre en train de le dĂ©couvrir, alors quâen fait elle le recouvre dâun linceul noir. De lâautre elle demande Ă sa servante de se saisir de la tĂȘte du gĂ©nĂ©ral, qui a roulĂ© vers la gauche de la chambre. La servante se rue vers sa maĂźtresse, et met un genou en terre pour ramasser la tĂȘte et lâenvelopper dans un linge blanc. Le visage de Judith est le sommet dâun triangle, dont la tĂȘte et les pieds dâHolopherne sont les deux points bas. Le triangle est colorĂ© symĂ©triquement, puisque la robe de la servante a la mĂȘme couleur que le corps dâHolopherne, alors que la superbe robe bleue de Judith peut rappeler le ciel et sa dĂ©termination religieuse.
Le dĂ©cor est celui de la tente du gĂ©nĂ©ral : lit dâapparat auquel les rideaux donnent une dimension thĂ©Ăątrale, magnifique cuirasse noire sur la table blanche, pan Ă©cartĂ© qui laisse voir le camp dans la nuit. Quant Ă lâarme, il faut la deviner sur la marche du lit, car ici, il n'y a ni sang, ni trace de violence... rien nâĂ©voque la mort, puisquâil sâagit de « lâexaltation de JĂ©rusalem » et du salut du peuple juif.
2. Autrefois attribuĂ© Ă Tintoret, ce tableau est considĂ©rĂ© aujourd'hui comme une Ćuvre d'atelier. Le musĂ©e du Prado possĂšde une autre Judith de Tintoret.
Informations techniques
Notice #012238