Plakes pneumatikai (Mandylion et Keramion) - Codex Rossinensis
Analyse
Les têtes sont légèrement tournées vers l’extérieur, contrairement au code iconographique qui veut que la Sainte Face soit toujours représentée de face (voir cependant le Mandylion de la Panagia Phorbiotissa d’Asinou). Il s’agit de souligner la symétrie et l’inversion des deux images l’une par rapport à l’autre. Les motifs du tissu blanc à gauche (losanges avec fleurons) sont rouges ; à droite, ornements identiques, mais à motifs blancs sur fond rouge, et cette fois on ne voit pas de frange. Ces détails, comparés aux représentations byzantines et slaves ultérieures, qui sont agrémentées d’explications, désignent l’image de gauche comme le Mandylion d’Édesse, apporté à Constantinople en 944, et celle de droite comme Le Keramion, Sainte Face imprimée sur une tuile, qui provient de Syrie. Jusqu’au pillage de Constantinople par les Croisés en 1204, les deux Saintes Faces étaient conservées dans une chapelle du Grand Palais impérial.
Le Kérameion (dont le fond rouge a la couleur de la tuile) est représenté comme le négatif du Mandylion (dont le fond blanc a la couleur du drap) : la deuxième Sainte Face ne serait que la réplique de la première, mais toutes deux sont achiropiites, non faites de main d’homme.
Le titre Plakes pneumatikai s’explique par un passage de l’introduction de Jean Climaque à son Échelle céleste, dont c’est ici un manuscrit. L’auteur dit avoir tracé les préceptes divins de son livre directement sur les cœurs purs de ses auditeurs, « comme sur des feuilles de papier, ou mieux sur des planches spirituelles, Plakes pneumatikai. L’expression, selon Jean de Reitha, fait allusion aux Tables de la Loi. L’Échelle céleste prétend rivaliser avec les commandements de Moïse, ou plutôt les convertir en commandements chrétiens.
Les deux tables impliquaient de représenter deux Saintes Faces.
A gauche, la face du Christ est griffée : peut-être une trace tardive de réprobation de la part d’un lecteur iconoclaste ?
Début de l’Échelle céleste (1er des trente degrés, §3) :
« Mais, comme il faudrait des livres entiers pour dire tout ce qu’il y aurait à dire sur ces différentes espèces de créatures, et qu’un homme ignorant comme moi serait incapable d’une si grande entreprise, je crois qu’il vaut mieux que, pour obéir aux véritables serviteurs de Dieu, dont la tendre piété me fait violence, et dont le zèle et la bonne volonté me pressent, je me borne et m’arrête aux choses qui peuvent servir à l’édification de leurs âmes ; que, quelque incapable que je doive me reconnaître, je prenne la plume de leurs mains, et que, la trempant avec simplicité dans l’humble soumission à leurs vœux prononcés, j’aie lieu, malgré mon impuissance et mon incapacité, d’espérer et de recevoir de mon obéissance quelques grâces et quelques lumières, afin que, traçant sur un papier d’une admirable blancheur les règles d’une vie sainte et pure, je les trace aussi dans leurs cœurs bien préparés et saintement purifiés, que je les écrive sur des cahiers mystérieux (πλάκες πνευματικαὶ) et vivants. C’est de cette manière et dans ces dispositions que je vais commencer. »
1. Au dessus de la double représentation de la Sainte Face imprimée en positif et en négatif, on peut lire « PLAKES PN[EUMATI]KAI » (tables spirituelles).
3. Dans le manuscrit de Princeton, L’Echelle céleste est représentée par deux rectangles couchés portant également les mots Plakes Pn[eumati]kai, sans la Sainte Face, mais avec la mention IC XC (Ièsous Christos) : L’Échelle céleste renouvelle, dans un sens chrétien, les Tables de la Loi mosaïques.
Informations techniques
Notice #001249