Histoire de Noureddin Ali. Le génie effraye le bossu (1001 nuits, éd. Ledentu, 1832)
Notice précédente Notice n°10 sur 10
Analyse
Pendant que le génie encourageoit ainsi Bedreddin, et l’instruisoit de ce qu’il devoit faire, le bossu étoit véritablement sorti de la salle. Le génie s’introduisit où il étoit, prit la figure d’un gros chat noir, et se mit à miauler d’une manière épouvantable. Le bossu cria après le chat, et frappa des mains pour le faire fuir ; mais le chat, au lieu de se retirer, se roidit sur ses pattes, fit briller des yeux enflammés, et regarda fièrement le bossu en miaulant plus fort qu’auparavant, et en grandissant de manière qu’il parut bientôt gros comme un ânon. Le bossu, à cet objet, voulut crier au secours ; mais la frayeur l’avoit tellement saisi, qu’il demeura la bouche ouverte sans pouvoir proférer une parole. Pour ne pas lui donner de relâche, le génie se changea à l’instant en un puissant buffle, et sous cette forme, lui cria d’une voix qui redoubla sa peur : Vilain bossu. À ces mots, l’effrayé palefrenier se laissa tomber sur le pavé, et se couvrant la tête de sa robe pour ne pas voir cette bête effroyable, il lui répondit en tremblant : « Prince souverain des buffles, que demandez-vous de moi ? » « Malheur à toi, lui repartit le génie : tu as la témérité d’oser te marier avec ma maîtresse ! » « Eh, Seigneur, dit le bossu, je vous supplie de me pardonner : si je suis criminel, ce n’est que par ignorance ; je ne savois pas que cette dame eût un buffle pour amant. Commandez-moi ce qui vous plaira, je vous jure que je suis prêt à vous obéir. » « Par la mort, répliqua le génie, si tu sors d’ici, ou que tu ne gardes pas le silence jusqu’à ce que le soleil se lève ; si tu dis le moindre mot, je t’écraserai la tête. Alors, je te permets de sortir de cette maison ; mais je t’ordonne de te retirer bien vîte sans regarder derrière toi ; et si tu as l’audace d’y revenir, il t’en coûtera la vie. » En achevant ces paroles, le génie se transforma en homme, prit le bossu par les pieds ; et après l’avoir levé la tête en bas contre le mur : « Si tu branles, ajouta-t-il, avant que le soleil soit levé, comme je te l’ai déjà dit, je te prendrai par les pieds, et je te casserai la tête en mille pièces contre cette muraille. » (GF I 322)
1. Légende sous l'image dans le cartouche : « Si tu branles avant que le Soleil soit levé, je te casserai la tête en mille pièces contre cette muraille.
Informations techniques
Notice #023223