La Mort et le Bûcheron (Fables de La Fontaine, Barbin, 1668) - Chauveau
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Analyse
Une vignette pour deux fables,
15, La Mort et le malheureux,
16, La Mort et le bûcheron.
Texte de la fable 15 :
Un Malheureux appelait tous les jours
La mort Ă son secours;
Ă” Mort, lui disait-il, que tu me sembles belle !
Viens vite, viens finir ma fortune cruelle.
La mort crut en venant, l’obliger en effet.
Elle frappe Ă sa porte, elle entre, elle se montre.
Que vois-je ! cria-t-il, Ă´tez-moi cet objet ;
Qu’il est hideux ! que sa rencontre
Me cause d’horreur et d’effroi !
N’approche pas, ô Mort ; ô Mort, retire-toi.
Mécénas fut un galant homme :
Il a dit quelque part : Qu’on me rende impotent,
Cul-de-jatte, goutteux, manchot, pourvu qu’en somme
Je vive, c’est assez, je suis plus que content.
Ne viens jamais, ô Mort ; on t’en dit tout autant.
Fable 16Â :
Un pauvre bûcheron, tout couvert de ramée,
Sous le faix du fagot aussi bien que des ans
Gémissant et courbé, marchait à pas pesants,
Et tâchait de gagner sa chaumine enfumée.
Enfin, n’en pouvant plus d’effort et de douleur,
Il met bas son fagot, il songe Ă son malheur.
Quel plaisir a-t-il eu depuis qu’il est au monde ?
En est-il un plus pauvre en la machine ronde ?
Point de pain quelquefois, et jamais de repos.
Sa femme, ses enfants, les soldats, les impĂ´ts,
Le créancier et la corvée
Lui font d’un malheureux la peinture achevée.
Il appelle la Mort ; elle vient sans tarder,
Lui demande ce qu’il faut faire.
C’est, dit-il, afin de m’aider
A recharger ce bois ; tu ne tarderas guère.
Le trépas vient tout guérir ;
Mais ne bougeons d’où nous sommes :
PlutĂ´t souffrir que mourir,
C’est la devise des hommes.
1. Signé en bas au centre « F. C. »
2. Livre I, Fable 15.
Informations techniques
Notice #004746