Judith - Jan Sanders Van Hemessen
Analyse
Cette Judith exprime toute la beautĂ©, la force et la dĂ©termination de lâhĂ©roĂŻne biblique. Mais elle est en contradiction avec le texte, par le cĂŽtĂ© Ă©rotique de la scĂšne. Il est en effet plusieurs fois indiquĂ©, que Judith est une belle et jeune veuve, mais chaste, et quâelle entre dans la tente dâHolopherne, alors quâil est dĂ©jĂ ivre et endormi. Elle affirme quâelle nâa pas couchĂ© avec lui, et qu'elle a gardĂ© sa puretĂ©.
« Judith seule fut laissĂ©e dans la tente avec Holopherne effondrĂ© sur son lit, car il Ă©tait noyĂ© dans le vin.Â
[âŠ] âOui, vive le Seigneur, qui m'a gardĂ©e dans le chemin oĂč j'ai marchĂ©, car mon visage n'a sĂ©duit cet homme que pour sa perte : il n'a pas commis avec moi le pĂ©chĂ© qui m'aurait souillĂ©e et dĂ©shonorĂ©e.â » (Judith, XIII, 2-16)
Judith se dresse de toute sa hauteur et se tourne vers nous. Elle tient la lourde Ă©pĂ©e avec vigueur grĂące Ă une musculature exceptionnelle, son regard est clair et volontaire, nâexprimant aucun sentiment. La dĂ©capitation a-t-elle dĂ©jĂ eu lieu ou se prĂ©pare-t-elle ? On voit la tĂȘte dâHolopherne Ă gauche, il est sur son lit, il n'y a aucun signe de violence, ni de sang, il semble dormir. Judith « sâavançant vers la barre du lit qui Ă©tait prĂšs de la tĂȘte dâHolopherne, elle en retira son cimeterre » : elle pivote et s'apprĂȘte Ă se retourner pour frapper. Le sac quâelle tient de sa main gauche et qui doit recueillir la tĂȘte coupĂ©e permet au peintre de souligner le mouvement du corps qui prend son Ă©lan pour porter le coup fatal.
De droite Ă gauche, le spectateur suit ainsi les trois temps du rĂ©cit : Judith Ă droite a apportĂ© un sac pour la tĂȘte, elle a prĂ©mĂ©ditĂ© son coup ; Judith au centre dĂ©gaine l'Ă©pĂ©e, elle passe Ă l'action ; la tĂȘte d'Holopherne Ă gauche Ă©clairĂ©e par la lumiĂšre dans l'ombre de la tente est en quelque sorte dĂ©jĂ sĂ©parĂ©e du corps. Ces trois temps rĂ©unis en un seul mouvement condensent le rĂ©cit dans l'instant prĂ©gnant d'une scĂšne.
Peintre anversois de la Renaissance flamande maniĂ©riste, Jan Sanders van Hemessen a en quelque sorte sĂ©cularisĂ© la scĂšne, en reprĂ©sentant une hĂ©roĂŻne volontaire, Ă©nergique, libĂ©rĂ©e, dont la nuditĂ© combattante Ă©voque plus les hĂ©roĂŻnes de lâAntiquitĂ© que le culte de l'Eglise.
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2. Fonds Wirt D. Walker.
Informations techniques
Notice #004986