Judith et Holopherne - Caravage
Analyse
La scĂšne se passe dans la tente d'Holopherne, le gĂ©nĂ©ral qui dormait est tirĂ© par les cheveux et a la gorge tranchĂ©e par l'Ă©pĂ©e que tient Judith, Ă droite une vieille servante tient un sac pour recueillir la tĂȘte coupĂ©e.
« Holopherne Ă©tait Ă©tendu sur son lit, plongĂ© dans l'assoupissement d'une complĂšte ivresse. Judith avait dit Ă sa servante de se tenir dehors devant la chambre, et de faire le guet. Debout devant le lit, Judith pria quelque temps avec larmes, remuant les lĂšvres en silence : âSeigneur, Dieu d'IsraĂ«l, disait-elle, fortifiez-moi, et jetez en ce moment un regard favorable sur l'Ćuvre de mes mainsâŠâ Elle s'approcha de la colonne qui Ă©tait Ă la tĂȘte du lit d'Holopherne, dĂ©tacha son Ă©pĂ©e qui y Ă©tait suspendue et,  l'ayant tirĂ©e du fourreau, elle saisit les cheveux d'Holopherne, en disant : âSeigneur Dieu, fortifiez-moi Ă cette heure !â Et de deux coups sur la nuque, elle lui trancha la tĂȘte. » (Judith 13, 4-10)
Comme l'action et le rĂ©cit, la tĂȘte est au centre du tableau: le visage d'Holopherne hurlant de douleur, les yeux rĂ©vulsĂ©s, il essaie de voir ce qui se passe, ses mains prennent appui pour se relever, sa tĂȘte dĂ©jĂ Ă moitiĂ© coupĂ©e, vacille⊠le peintre reconstruit un vĂ©ritable instantanĂ©.
Judith vient de se retourner pour agir: de sa main elle tient fermement une lourde arme de guerre, dont elle se sert avec aisance, mais sa main est crispĂ©e, son visage est tendu et une ride marque un certain dĂ©goĂ»t. Le visage de la servante exprime la stupĂ©faction par les yeux et le dĂ©goĂ»t par la moue : elle tend un pan de sa robe, elle  va porter cette tĂȘte comme elle porte habituellement des marchandises.
Au-delĂ des gestes et des expressions, le clair-obscur donne un sens religieux Ă la scĂšne. La lumiĂšre divine vient de trĂšs haut Ă gauche, Ă©clairant presque verticalement l'Ă©paule de l'homme et le buste de la femme. Elle dĂ©coupe le corps d'Holopherne en plusieurs morceaux, avant quâil ne le soit rĂ©ellement par le glaive. Judith sort de l'ombre, elle est Ă©clairĂ©e par Dieu, ses bras guidĂ©s par lui,  c'est son geste qui est lumineux, son visage aussi, car sa dĂ©termination est fondĂ©e sur sa foi.
2. « Il peignit pour les seigneurs Costi une Judith qui coupe la tĂȘte dâHolopherne ». Cette citation de Baglione (1642) a permis dâidentifier cette toile comme du Caravage (P. Longhi) : elle Ă©tait rĂ©putĂ©e perdue jusquâĂ sa dĂ©couverte en 1950 par Pico Cellini dans la collection de la famille Coppi.
3. La toile dâArtemisia Gentileschi, mais aussi celle postĂ©rieure de Valentin de Boulogne, ont certainement Ă©tĂ© inspirĂ©es par cette toile. Il en existe une version postĂ©rieure, datĂ©e de 1607, Ă Naples, considĂ©rĂ©e aujourdâhui comme une copie.
Informations techniques
Notice #006246