L’oiseau blessé d’une flèche (Fables de La Fontaine, Barbin, 1668) - Chauveau
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Analyse
Mortellement atteint d'une flèche empennée,
Un Oiseau déplorait sa triste destinée,
Et disait, en souffrant un surcroît de douleur :
Faut-il contribuer à son propre malheur !
Cruels humains ! Vous tirez de nos ailes
De quoi faire voler ces machines mortelles.
Mais ne vous moquez point, engeance sans pitié :
Souvent il vous arrive un sort comme le nôtre.
Des enfants de Japet toujours une moitié
Fournira des armes à l'autre.
Les flèches sont des « machines mortelles » qui volent mieux lorsqu'elles sont « empennées », c'est-à-dire lorsqu'on leur ajoute un morceau de plume à la base qui va les guider et soutenir dans leur trajet dans les airs. Du coup, l'oiseau atteint d'une flèche empennée a été atteint grâce à une partie de lui-même ; il a contribué à sa propre mort.
La fable consiste dans le discours de l'oiseau, qui philosophe au moment de mourir : discours absurde dans un moment étiré qui n'existe pas. Techniquement, c'est le moment de la scène, le moment paroxystique ou l'action trouve son point culminant et demeure suspendue. La Fontaine en tourne en dérision le suspens. Sur l'image, le chasseur a déjà tiré la flèche, mais demeure en position comme s'il allait la tirer. Quant à la flèche, elle a percé l'oiseau depuis le haut, et non d'en bas, ce qui est absurde : à moins que l'oiseau ne se soit retourné en tombant ?
1. Signé en bas à droite « F. C. ».
2. Livre II, Fable 6.
Informations techniques
Notice #008848