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Recherche infructueuse

Le passage du torrent (Paul et Virginie, 1806) - Roger after Girodet

Description

« La seconde planche a pour sujet Paul traversant un torrent, en portant Virginie sur ses épaules. Il a pour titre, Passage du torrent, et pour inscription ces paroles du texte, N’aie pas peur, je me sens bien fort avec toi.
Le fond représente les sites bouleversés des montagnes de l’Île de France où les rivières qui descendent de leurs sommets se précipitent en cascades. Ce fond âpre, rude et rocailleux, relève l’élégance, la grâce et la beauté des deux jeunes personnages qui sont sur le devant, dans la fleur d’une vigoureuse adolescence. Paul, au milieu des roches glissantes et des eaux tumultueuses, porte sur son dos Virginie tremblante. Il semble devenu plus léger de sa belle charge, et plus fort du danger qu’elle court. Il la rassure d’un sourire, contre la peur si bien exprimée dans l’attitude craintive de son amie, et dans ses yeux orbiculaires. La confiance de son amante, qui le presse de ses bras, semble naître ici, pour la première fois, du courage de l’amant ; et l’amour de l’amant, si bien rendu par ses tendres regards et son sourire, semble naître à son tour de la confiance de son amante.
On trouvera peut-ĂŞtre que ces deux charmantes figures sont un peu fortes, comparĂ©es avec quelques-unes de celles qui les suivent ; mais on doit considĂ©rer qu’elles sont plus rapprochĂ©es de l’oeil du spectateur. Qui ne voudrait voir la beautĂ© de leurs proportions encore plus dĂ©veloppĂ©es ? Aussi l’auteur se propose-t-il d’en faire un tableau grand comme nature. Ce sujet l’emportera, Ă  mon avis, sur celui de l’amoureux Centaure, qui porte sur sa croupe, Ă  travers un fleuve, la tremblante DĂ©janire. Comment le Guide a-t-il pu choisir pour sujet de son charmant pinceau un monstre composĂ© de deux natures incompatibles ? Comment une bouche humaine pourrait-elle alimenter Ă  la fois l’estomac d’un homme et celui d’un cheval ? Cependant on en supporte la vue sans peine, et mĂŞme avec plaisir : tant l’autoritĂ© d’un grand nom et celle de l’habitude ont de pouvoir ! Elles nous font adopter, dès l’enfance, les plus Ă©tranges absurditĂ©s au physique et au moral, sans que nous soyons mĂŞme tentĂ©s, dans le cours de la vie, d’y opposer notre raison. Je dois le beau dessin de M. Girodet Ă  son amitiĂ©. Il m’en a fait prĂ©sent. Il serait seul capable de lui faire une grande rĂ©putation, si elle n’était dĂ©jĂ  florissante par le charme et la variĂ©tĂ© de ses conceptions. Il y rĂ©unit toujours les grâces naĂŻves de la nature Ă  l’étude sĂ©vère de l’antique. On reconnaĂ®t ici l’auteur des tableaux du bel Endymion endormi dans une forĂŞt, Ă©clairĂ© de la lumière amoureuse de la dĂ©esse des nuits ; d’Hippocrate, refusant l’or et la pourpre du roi de Perse, qui voulait l’attirer Ă  son service ; et de l’ApothĂ©ose de nos guerriers dans le palais d’Ossian. Je pense que le premier eĂ»t fait Ă  Athènes le plus bel ornement du salon d’Aspasie ; que le second eĂ»t Ă©tĂ© placĂ© sous le pĂ©ristyle de quelque temple pour y servir Ă  jamais d’exemple de patriotisme ; et qu’enfin le troisième eĂ»t Ă©tĂ© peint sur la voĂ»te du PanthĂ©on ; mais il occupe, chez nous, une place plus honorable dans le palais de l’empereur, l’illustre chef de nos hĂ©ros. Le paysage de mon dessin a Ă©tĂ© gravĂ© Ă  l’eau-forte par M. Dussault, dont j’ai dĂ©jĂ  parlĂ© ; et le groupe des deux figures l’a Ă©tĂ© au pointillĂ© et au burin par M. Roger, qui excelle dans ce genre. Il a bien voulu suspendre ses nombreux travaux pour s’occuper de celui-ci, si digne du burin d’un grand maĂ®tre. Â» (PrĂ©ambule de Bernardin de Saint-Pierre Ă  l’édition de 1806)

History :

2. SignĂ© sous l’image Ă  gauche « A. L. Girodet inv. del. Â», Ă  droite « B. Roger Sc. Â»

Textual Sources :
Bernardin de Saint-Pierre, Paul et Virginie (1787)

Technical Data

Notice #012945

Image HD

Past ID :
B2264
Image editing :
Image web