Les deux amis (La Fontaine, Desaint et Saillant, 1755) - Oudry
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Analyse
Deux vrais amis vivaient au Monomotapa :
L’un ne possédait rien qui n’appartînt à l’autre :
           Les amis de ce pays-lĂ
        Valent bien, dit-on, ceux du nôtre.
Une nuit que chacun s’occupait au sommeil,
Et mettait à profit l’absence du soleil,
Un de nos deux Amis sort du lit en alarme ;
Il court chez son intime, Ă©veille les Valets :
Morphée avait touché le seuil de ce palais.
L’ami couché s’étonne, il prend sa bourse, il s’arme ;
Vient trouver l’autre, et dit : Il vous arrive peu
De courir quand on dort ; vous me paraissez homme
A mieux user du temps destiné pour le somme :
N’auriez-vous point perdu tout votre argent au jeu ?
En voici. S’il vous est venu quelque querelle,
J’ai mon épée, allons. Vous ennuyez-vous point
De coucher toujours seul ? Une esclave assez belle
Était à mes côtés ; voulez-vous qu’on l’appelle ?
Non, dit l’ami, ce n’est ni l’un ni l’autre point :
          Je vous rends grâce de ce zèle.
Vous m’êtes en dormant un peu triste apparu ;
J’ai craint qu’il ne fût vrai, je suis vite accouru.
          Ce maudit songe en est la cause.
Qui d’eux aimait le mieux ? Que t’en semble, lecteur ?
Cette difficulté vaut bien qu’on la propose.
Qu’un ami véritable est une douce chose !
Il cherche vos besoins au fond de votre cœur ;
           Il vous épargne la pudeur
           De les lui découvrir vous-même.
          Un songe, un rien, tout lui fait peur
          Quand il s’agit de ce qu’il aime.
1. Légende dans le cartouche en bas de la gravure, « LES DEUX AMIS. Fable CLIII. »
Signé sous la gravure à gauche « J. B. Oudry inv. », à droite « L. Le Mire sculp. »
2. Fables choisies mises en vers…, tome troisième.
Informations techniques
Notice #014346