Nymphe et satyre, dit aussi Jupiter et Antiope - Watteau
Analyse
Jupiter métamorphosé en satyre découvre la nudité de la nymphe Antiope endormie. Le linge blanc qui entoure Antiope délimite la scène proprement dite, l'objet de la représentation, par différence avec ce qui pointe vers cet objet, le regard de Jupite-satyre et l'écrin du paysage. Jupiter découvre la nudité d’Antiope par effraction, alors qu’elle est endormie et, de plus, par derrière : il ne fait qu’entrapercevoir ce qui nous est à nous pleinement livré, la nudité, la gorge, la naissance du sexe de la jeune femme. Nous pouvons nous indigner de la lubricité du satyre, tout en jouissant impunément de ce que lui a peine à voir. On retrouve ici le dispositif des Suzannes au bain. L’effraction constitutive de la jouissance esthétique est en quelque sorte moralisée par le dispositif.
Le linge d’Antiope, qui délimite le lieu de l'intimité et du sommeil de la nymphe, est redoublé par la forte ligne formée par le bras de Jupiter prolongé par celui de la nymphe endormie, qui entourent plus précisément son sexe, objet de désir du satyre. Ces deux systèmes de délimitation — le linge et les bras — ne se superposent pas exactement et ne montrent pas, ne signifient pas non plus exactement la même chose. On voit bien ainsi comment l’époque hésite entre deux systèmes sémiologiques, l’ancien dispositif d’écran, fondé sur l'effraction et le désir, et le nouveau dispositif sensible, où le secret et l'intime deviennent l'enjeu essentiel.
Informations techniques
Notice #001611