La Visite de la Comtesse (Pamela 1742, vol. 4) - Gravelot
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Analyse
A la lettre XXIX, PamĂ©la apprend Ă lady Davers quâelle doit recevoir la visite de la Comtesse douairiĂšre de âŠâŠ, celle-lĂ mĂȘme qui, dĂ©guisĂ©e en Nonne lors de la Mascarade, avait fait tant dâavances Ă M. B :
« il paroĂźt, par ce que vous mâavez dit, Madame, quâil a fait entrer la Comtesse dans ses idĂ©es sur la polygamie » (p. 210). Furieux de la jalousie de PamĂ©la, M. B contraint celle-ci Ă prĂ©senter Guillaume, leur fils, Ă la Comtesse et Ă sa sĆur.   Â
« Voulez-vous le voir Ă prĂ©sent, Madame, dit M. BâŠ?   Â
En disant cela, il ne baissa point les yeux ; mais la Comtesse, badinant avec son Ă©ventail, jettoit les yeux tantĂŽt sur lui, tantĂŽt sur moi, & quelquefois elle les baissoit, se sentant un peu coupable. Pour moi, mes premieres Ă©motions Ă©tant passĂ©es, je mâenveloppai dans mon innocence, & je mâestimois, Ă cause de cela, supĂ©rieure mĂȘme Ă une Comtesse.   Â
De tout mon cĆur, Monsieur BâŠ.., rĂ©pondit-elle.   Â
Je sonnai. Polly, dites Ă la nourrice quâelle apporte ici mon GuillaumeâŠâŠ. Non, dis-je avec emphase. [Non pour Mon : erreur typographique.]   Â
Jâallai Ă la rencontre de la nourrice jusques sur le seuil de la porte, & jâapportai mon cher enfant dans mes bras. Quel enfant, & quelle mere, dit la Vicomtesse ! Â Â Â
Voulez-vous me le confier pour un moment, Madame, dit la Comtesse ? Oui, pensai-je, avec beaucoup plus de [218] plaisir que je ne vous confierois mon chez, mais peu sage. M. BâŠ..   Â
Je le lui donnai. Je crus quâelle lâĂ©toufferoit par lâardeur de ses baisers. Aimable garçon ! charmante crĂ©ature ! Ensuite elle le pressoit contre son trop aimable sein, & regardoit tantĂŽt lâenfant, & tantĂŽt M. BâŠ.. avec une si grande Ă©motion, que cela ne me plaisoit point du tout.    Allez-vous-en, femme peu sage, pensai-je, mais je nâosai pas le dire ! Allez-vous-en aussi, homme inconstant, dis-je en moi-mĂȘme ! Car vous me paroissez vous glorifier trop de la passion quâelle a pour votre garçon. Je souhaiterois ne vous pas aimer autant que je faisâŠâŠ.. Vous en croyez pas, Madame, que jâaie exprimĂ© cette pensĂ©e.    M. BâŠâŠ me regardoit, mais avec un air, me sembloit-il, trop semblable Ă celui quâil prenoit dans les prĂ©cĂ©dentes scenes, aussi mauvaises que celle-ci, & dont jâavois Ă©tĂ© plus que tĂ©moin. Mais, dis-je en moi-mĂȘme, Dieu me dĂ©livra alors ; je me confierai en lui. Je ne doute point quâil ne veuille Ă prĂ©sent exaucer mes prieres, & me restituer ton cĆur, sans sâĂȘtre laissĂ© corrompre, jâespere ; & cela pour lâamour de ta chere personne, aussi-bien que de moi.    La Vicomtesse prit lâenfant dâentre les mains de sa sĆur, & le baisa avec beaucoup de plaisir. Elle est mariĂ©e. PlĂ»t Ă Dieu que la Comtesse le fĂ»t aussi ! car M. BâŠâŠ.., comme je vous lâai dĂ©jĂ dit une fois, Madame, nâa jamais eu dâintrgues avec des femmes mariĂ©es. Son amour pour mon Guillaume ne mâĂ©toit donc pas suspect. Que jâaie la satisfaction, [219] dit la Vicomtesse, de rendre cet enfant Ă la charmante Maman. Je crois, ajouta-t-elle, nâavoir jamais vu de ma vie de plus beau spectacle que celui de cet enfant dans les bras de sa mere. »
1. En haut à droite « V. IV. p. 178 ». En bas à droite « H Gravelot inv sc »
Informations techniques
Notice #004497