Judith avec la tête d’Holopherne - Cranach
Analyse
Cranach a peint une série de tableaux représentant Judith tenant la tête d’Holopherne. Tous ont presque la même composition. Une belle jeune femme, habillée comme une riche patricienne allemande, est tournée vers nous : son visage et son regard sont fermés, sans aucune expression particulière. Judith brandit l’épée et nous présente la tête coupée d’Holopherne sur une sorte de table. La tête du mort est particulièrement tragique, puisque les yeux et la bouche semblent encore ceux d’un vivant. On retrouve là un certain goût pour le morbide, caractéristique de la fascination du gothique finissant pour la mort.
Cette mise en scène ne correspond à aucun moment du récit biblique, puisque il est dit :
« elle lui ôta la tête. Puis elle fit rouler son corps hors de la couche et enleva la moustiquaire des colonnes ; peu après, elle sortit et remit la tête d’Holopherne à sa suivante, qui la mit dans sa besace à provisions. » (Judith, XIII, 9)
Au Moyen Âge Judith a incarné plusieurs vertus, dont la Justice, et on trouve ce motif de Judith portant l’épée verticale, près de la tête d’Holopherne, dans les célèbres Allégories du bon et du mauvais gouvernement de Lorenzetti, à Sienne.
Judith incarne donc la Justice mais aussi la puissance du faible contre le fort. Ici, dans le contexte allemand, le luthérien Cranach fait de Judith un symbole de la résistance contre l’empereur catholique.
Ce tableau est aussi à comparer à la Salomé avec la tête de Jean-Baptiste, dont Cranach a fait aussi une série. La position des héroïnes est la même, leurs regards et les visages des morts aussi.
2. Entre dans la collection impériale de Vienne vers 1610-1619.
Informations techniques
Notice #004985