Le cordelier gras et le boucher tueur de porcs (Heptaméron N34, Amsterdam, 1698)
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Analyse
« Deux Cordeliers, escoutans le secret où l’on ne les avoit appelerz, pour avoir mal entendu le langage d’un boucher, meirent leur vie en danger. »
Deux cordeliers sont hébergés dans la demeure d’un boucher :
« Et, pour ce que entre leur chambre et celle de l’hoste n’y avoit que des aiz bien mal joinctz, leur print envye d’escouter ce que le mary disoit à sa femme estans dedans le lict ; et vindrent mectre leurs oreilles tout droict au chevet du lict du mary, lequel, ne se douctant de ses hostes, parloit à sa femme privement de son mesnaige » (Comparer ce dispositif avec Trim dans Tristram Shandy, avec Jacques le Fataliste, avec Déterville dans Aline et Valcour...)
Le boucher annonce à sa femme qu’il va tuer le lendemain un cordelier bien gras. Mais « cordelier » désigne ses cochons, non ses hôtes. Les deux cordeliers sautent par la fenêtre pour s’enfuir, mais le plus gras, blessé à la jambe est contraint de se réfugier dans la soue aux porcs (le tect).
« Mais, si tost que le matin fut venu, le boucher appresta ses grands cousteaulx et dist à sa femme qu’elle luy tint compaignye pour aller tuer son pourceau gras. Et quant il arriva au tect, auquel le Cordelier s’estoit caché, commencea à cryer bien hault, en ouvrant la petite porte : “Saillez dehors, car aujourd’huy j’auray de vos boudins ! » Le pauvre Cordelier, ne se pouvant soustenir sur sa jambe, saillyt à quatre piedz hors du tect, criant tant qu’il povoit misericorde. Et, si le pauvre frere eust grand paour, le boucher et sa femme n’en eurent pas moins ; car ilz pensoient que sainct François fust courroucé contre eulx de ce qu’ilz nommoient une beste cordelier, et s emirent à genoulx devant le pauvre frere, demandans pardon à sainct François et à sa religion, de sorte que le Cordelier cryoit d’un costé misericorde au boucher, et le boucher, à luy d’aultre, tant que les ungs et les aultres furent ung quart d’heure sans se povoir asseurer. »
Le cordelier déboule à gauche de la soue, tandis que le boucher à droite se laisse tomber à genoux, sa hache à terre devant lui. La femme du boucher arrive derrière lui à droite avec un couteau.
Etrangement, on s’apprête au second plan à dépercer une bête qui n’est pas un cochon, vu le cou, la queue et la toison. Un mouton ?
2. 4e journée, 34e nouvelle.
Informations techniques
Notice #007663