Didon accueille Énée et les Troyens (Virgile, Énéide 1, éd. Brant, Strasbourg Grüninger 1502, f149)
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Analyse
Sous la gravure, on peut lire :
Vix ea fatus erat cum circumfusa repente
scindit se nubes et in aethera purgat apertum.
Restitit Aeneas claraque in luce refulsit
os umerosque deo similis ; namque ipsa decoram (586-589)
[A peine (Ilionée) avait-il dit ces mots que le nuage qui les enveloppait s'ouvre tout à coup et s'éclaircit en air transparent. Énée était bien là, dans une atmosphère lumineuse, avec le visage et les épaules d'un dieu ; d'un souffle sa mère en personne lui avait donné de beaux cheveux… trad. P. Veyne]
La gravure précédente représentait le discours d'Ilionée ; celle-ci représente le discours d'Énée. L'objet de ce second discours n'est plus la demande d'hospitalité, mais l'offre des présents.
L'image s'ordonne autour du groupe central des jeunes courtisans, spectateurs du discours d'Énée.
Énée surgit devant Didon qui marque sa surprise par son buste renversé en arrière et ses mains. Mais la nuée, ou les restes de la nuée ne sont pas représentés. Le discours d'Énée, en haut à droite, s'adresse à Didon, qu'il remercie pour ses bienfaits :
« Nous n'avons pas les moyens, Didon, de reconnaître dignement tes bienfaits, et tout ce qui subsiste de la nation troyenne, dispersée à travers le vaste monde, ne l'a pas davanatage. Puissent les dieux […], puisse la conscience d'avoir bien agi t'en récompenser dignement, praemia digna ferant. » (601-605)
L'objet du discours, ce sont les praemia digna. Énée charge Achate, placé derrière lui, d'aller avertir Ascagne resté auprès des bateaux, en haut à gauche (« Énée dépêche en tout hâte Achate vers les navires », v. 644, repris v. 656). Et il ordonne d'apporter des cadeaux, Munera ferre jubet, 647-8 : c'est ce qui est représenté en bas à gauche par le navire qui apporte des ballots et des tonneaux (du solide et du liquide).
Il ne s'agit pas ici des deux mouillages troyens, celui d'Ilionée et de ses compagnons, et celui d'Énée où est resté Ascagne. Il s'agit de deux parties du discours d'Énée, celle où il envoie Achate, et celle où il lui dit de ramener les cadeaux.
Le principe de la largesse est la surenchère : à la promesse des dons que fait Énée, Didon répond en ordonnant d'envoyer vingt taureaux, cent porcs et cent agneaux aux Troyens restés sur le rivage (634-5) : on voit les taureaux, conduits par un bouvier, tout en haut de l'image.
En bas à droite, comme dans la gravure précédente, est représenté le tiers exclu : Carthage est un port fortifié, capable de repousser l'ennemi ; mais justement Carthage s'ouvre et accueille.
2. Folio CXLIX recto.
Informations techniques
Notice #008148