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Recherche infructueuse

The Sacrifice of Iphigenia - Carle Vanloo

Image series :
Date :
1757
Type of image :
Peinture sur toile
Dimensions (HxL cm) :
426x613 cm
Nouveau Palais, GKI5230

Description

Livret du Salon de 1757 :

« Par M. Carle Vanloo, Écuyer, Chevalier de l’Ordre de S. Michel, Recteur. Directeur de l’École Royale des Élèves protégés. […]
6. Le Sacrifice d’Iphigénie. Tableau de 14 pieds de haut sur 20 pieds de large, destiné pour le Roy de Prusse. »

Au fond à droite on distingue les vaisseaux des Grecs, dont le vent commence à gonfler les voiles. A gauche, Clytemnestre s’évanouit. Au-dessus d’Iphigénie assise, Diane tenant son arc et surmontée d’un croissant de lune intervient.

Mercure de France, octobre 1757
Article IV. Beaux-Arts. Arts agréables. Peinture.
Observations sur les Tableaux exposés au Louvre, par MM. De l’Académie royale de Peinture & de Sculpture.

Le Sacrifice d’IphigĂ©nie prĂ©sente une grande machine, oĂą toute l’habiletĂ© de M. Carle Vanloo s’est dĂ©veloppĂ©e. IphigĂ©nie est plongĂ©e dans cet accablement qui doit prĂ©cĂ©der le sacrifice cruel auquel elle est destinĂ©e  ; Calchas s’avance pour lui donner le coup mortel, tout annonce en lui le dĂ©sordre d’un enthousiaste, qui s’imagine en rĂ©pandant le sang obĂ©ir Ă  la voix du ciel & dĂ©sarmer son courroux. Agamemnon & Clytemnestre sont accablĂ©s de douleur  ; mais la tristesse d’Agamemnon n’est point celle de Clytemnestre. La mĂŞme passion est rendue & exprimĂ©e diffĂ©remment, M. Vanloo a bien fait de ne pas suivre l’exemple de Timante. Il n’a pas dĂ», comme ce Peintre Grec, voiler la tĂŞte d’Agamemnon, puisqu’il a sçu si bien allier dans ce caractere la tristesse & la majestĂ©. Ce n’est pas un homme ordinaire qui pleure sa fille  ; c’est un pere, c’est un HĂ©ros, c’est un Roi qui gĂ©mit sur son sort. Quelques Grecs sont sur le devant du tableau. Ils sont ravis d’étonnement & d’admiration de voir Diane descendre des cieux pour prendre en main la dĂ©fense de l’innocence, & dĂ©rober IphigĂ©nie Ă  la mort. On peut dire après avoir vu celle de M. Vanloo, que Racine Ă©toit Peintre, & que M. Vanloo est PoĂ«te. (p.  157-158)

Grimm, dans la Correspondance littéraire, consacre un article spécial à ce tableau, qui suscita toute une controverse.

« A Paris, ce 1er octobre 1757 Avant de parler de l’exposition des tableaux que l’AcadĂ©mie royale de peinture et de sculpture a faite, selon l’usage, dans le salon du Louvre, il est Ă  propos de dire un mot du tableau d’IphigĂ©nie en Aulide peint par M. Carle-Vanloo, et de la dispute qui s’est Ă©levĂ©e Ă  ce sujet. Le roi de Prusse que ses vertus militaires n’empĂŞchent point d’aimer les arts et de s’en occuper, avait commandĂ© avant le commencement de la guerre prĂ©sente trois grands tableaux aux trois premiers peintres de l’école française. M. Pierre devait traiter le jugement de Pâris, il n’a rien exposĂ©. M. Restout chargĂ© du Triomphe de Bacchus a exposĂ© son tableau qui a, je crois, vingt pieds de large sur quatorze de hauteur. […] Le sujet le plus difficile a Ă©tĂ© rĂ©servĂ© au peintre dont le talent a actuellement le plus de rĂ©putation en France, Ă  M. Carle-Vanloo. Le sacrifice d’IphigĂ©nie est un des plus grands sujets qu’on puise proposer en peinture. Tout le monde connaĂ®t la manière dont il a Ă©tĂ© traitĂ© par le fameux peintre de l’antiquitĂ© Timanthe. M. Vanloo n’a pas voulu le copier, il a pensĂ© son tableau diffĂ©remment. Dès l’ouverture du salon, les faiseurs de brochures Ă©taient en campagne. Je crois que M. Vanloo a Ă  se plaindre Ă©galement et de ses panĂ©gyristes et de ses censeurs. Les uns par des Ă©loges outrĂ©s ont dĂ©goĂ»tĂ© le public de l’indulgence dont le peintre pouvait avoir besoin  ; les autres moins empressĂ©s de faire des critiques pour l’avantage des arts que pour nuire Ă  ceux qui s’y distinguent, mĂ©ritent l’indignation de tous les honnĂŞtes gens. Le première brochure qui parut, Ă©tait intitulĂ©e Description d’un tableau reprĂ©sentant le sacrifice d’IphigĂ©nie peint par monsieur Carle Vanloo  ; on l’attribua Ă  M. le comte de Caylus, et il faut la lire pour avoir une idĂ©e de la manière dont le peintre a composĂ© et exĂ©cutĂ© son tableau. Cette brochure a indisposĂ© le public qui n’a pas besoin d’être endoctrinĂ© de la sorte pour trouver les beautĂ©s rĂ©elles. Toutes les parties du tableau y sont portĂ©es aux nues, et l’auteur a eu l’indiscrĂ©tion de blâmer la pensĂ©e sublime de Timanthe qui dĂ©sespĂ©rant de trouver une expression assez forte pour rendre la douleur d’Agamemnon, prit le parti de lui voiler le visage. BientĂ´t on vit paraĂ®tre dans un journal obscur intitulĂ© Observations sur la physique et les arts, dont monsieur Toussaint est l’auteur, une lettre dans laquelle le tableau, et, en gĂ©nĂ©ral, le talent de M. Vanloo Ă©taient cruellement maltraitĂ©s. Cette lettre, qu’on a imprimĂ©e sĂ©parĂ©ment, vient d’un Ă©lève de M. Vien, un de nos peintres cĂ©lèbres. J’ignore le nom du jeune homme. Sa critique contient quelques observations assez fines, surtout sur la partie de l’art  ; mais l’acharnement injuste et violent qu’on lui remarque partout contre M. Vanloo a Ă´tĂ© tout crĂ©dit Ă  son ouvrage. Un partisan de M. Vanloo ne tarda pas Ă  rĂ©pondre Ă  cette lettre critique, et Ă  observer en passant, modestement, que le dessin de Rubens ne peut entrer en comparaison avec celui de Carle-Vanloo, et que la plupart de ses grands ouvrages ont l’air de plusieurs petits tableaux qu’on aurait cousus ensemble pour en former un grand, au lieu que dans les ouvrages de l’artiste français, on ne peut supprimer une seule figure, sans dĂ©truire la belle conduite de l’ensemble. VoilĂ  donc M. Vanloo au-dessus de Rubens dans le dessin et dans la composition. Il faut ĂŞtre bien bĂŞte pour avancer de pareilles impertinences, et mettre Carle-Vanloo sans aucune nĂ©cessitĂ© en parallèle avec le plus beau gĂ©nie que la peinture ait produit, et dont surtout, les compositions sublimes ont fait l’admiration de toute l’Europe. M. Cochin secrĂ©taire de l’AcadĂ©mie, regardĂ© par nos artistes comme le premier dessinateur de l’école française, a rĂ©pondu de son cĂ´tĂ© Ă  la critique du tableau d’IphigĂ©nie, par des RĂ©flexions insĂ©rĂ©es dans le Mercure, et qu’on a depuis imprimĂ©es sĂ©parĂ©ment. Cette rĂ©ponse est sage et mesurĂ©e. Elle fait honneur Ă  M. Cochin, comme tout ce qui est sorti jusqu’à prĂ©sent de sa plume. J’y relèverai, cependant, un principe qui ne me paraĂ®t pas exact. Monsieur Cochin dit qu’on ne peut pas rĂ©unir toutes les parties de l’art, que l’une exclut souvent l’autre, et il croit que la supĂ©rioritĂ© dans le dessin et celle du coloris ne sauraient s’allier ensemble. Cette assertion me paraĂ®t ĂŞtre contraire Ă  l’exemple de plusieurs grands hommes d’Italie. La supĂ©rioritĂ© dans le dessin, dit M.  Cochin, est l’effet d’un gĂ©nie plein de feu, et celle du coloris, d’un gĂ©nie attentif et exact. L’exemple de Rubens est contraire Ă  cette remarque  ; son dessin n’est pas de la dernière correction, mais c’est tout ensemble et le plus grand coloris, et le gĂ©nie le plus poĂ©tique, le plus fougueux, le plus rempli de feu qu’il y ait jamais eu en peinture. Quand vous aurez parcouru les diffĂ©rentes brochures dont je viens de parler, je vous demanderai la permission de dire mon sentiment sur le tableau d’IphigĂ©nie. Ce tableau mĂ©rite, sans doute, des Ă©loges Ă  plusieurs Ă©gards  ; mais il y a aussi de grands dĂ©fauts Ă  relever. Je ne parle pas des petits dĂ©tails comme de ce soldat placĂ© derrière le petit sacrificateur dont M. de Caylus fait un Ă©loge si pompeux et qui est la figure la plus maussade qu’on puisse trouver. J’irai Ă  des reproches plus graves. Plusieurs connaisseurs ont [193] remarquĂ© que les draperies de ce tableau avaient l’air collĂ©es sur la chair des personnages. Ce n’est pas ainsi qu’il faut flatter le nu. La figure d’IphigĂ©nie est froide. Elle a l’air d’une personne qui dort. La douleur d’Agamemnon est commune. C’est un homme qui lève les yeux et les bras au ciel. Il n’y a point de gĂ©nie Ă  tout cela. MĂŞme la figure de Clitemnestre ne me touche pas. Celle de Calchas m’a paru fort noble et fort belle. Le censeur de M. Vanloo lui reproche durement cette Clitemnestre froidement Ă©vanouie pour perpĂ©tuer la triste monotonie de son tableau. Il aurait voulu voir cette mère infortunĂ©e en fureur, courir Ă  l’autel pour arracher sa fille au glaive qui la menace, et les chefs des Grecs occupĂ©s Ă  la retenir. On a relevĂ© l’injustice de cette critique. Peut-on reprocher Ă  un peintre d’avoir suivi sa pensĂ©e plutĂ´t que celle d’un autre, surtout, quand on ne peut prouver que la sienne est fausse et mauvaise  ? Ce n’est pas tout. Dans le cas dont il s’agit, c’est la pensĂ©e du censeur qui me paraĂ®t fausse. Clitemnestre doit ĂŞtre livrĂ©e Ă  tout l’excès du dĂ©sespoir aussi longtemps qu’IphigĂ©nie n’est point sur l’autel. Dès ce moment redoutable oĂą elle ne peut plus ĂŞtre sauvĂ©e par aucune puissance humaine, sa mère doit succomber sous le poids de la douleur et tomber sans vie. VoilĂ  la gradation de la nature. Le dĂ©sespoir le plus profond suppose une Ă©tincelle d’espoir, quand cette Ă©tincelle a disparu, on n’est plus furieux  ; mais on succombe et on meurt. Un reproche juste qu’on peut faire Ă  M. Vanloo, c’est de n’avoir pas mis les personnages les plus cĂ©lèbres Ă  la place de ces simples soldats. J’aurais volontiers supprimĂ© Clitemnestre, mais est-il permis d’avoir oubliĂ© Ulysse qui a jouĂ© un si grand rĂ´le dans cette affaire  ? Quel personnage Ă  peindre  ! M. Diderot aurait voulu le voir embrasser Agamemnon dans ce moment terrible, pour lui dĂ©rober par ce mouvement de pitiĂ© l’horreur du spectacle. Cela aurait Ă©tĂ© admirablement dans le caractère d’Ulysse. Je ne sais si l’effet d’une pensĂ©e aussi dĂ©liĂ©e aurait Ă©tĂ© assez frappant en peinture. Â»

Textual Sources :
Lucrèce, Titus Lucretius Carus (98av-55av)
OM12 - Métamorphoses d'Ovide - livre 12

Technical Data

Notice #005971

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Past ID :
A5290
Image editing :
Photo numérique
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Berlin, Bildarchiv Preussischer Kulturbesitz