Le chaste Joseph (version de Los Angeles) - Lagrenée
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Analyse
Livret du Salon de 1767 :
« Par M. La Grenée, Professeur.
19. [âŠ]
32. La Chaste Susanne.
33. Le Chaste Joseph.
Tableau de 13 pouces sur 9. »
Description de Diderot au Salon de 1767Â :
« Petit tableau.
On voit Ă gauche la femme adultĂšre, toute nue, assise sur le bord de sa couche ; elle est belle, trĂšs belle de visage et de toute sa personne, belles formes, belle peau, belles cuisses, belle gorge, belles chairs, beaux bras, beaux pieds, belles mains, de la jeunesse, de la fraĂźcheur, de la noblesse ; je ne sais, pour moi, ce quâil fallait au fils de Jacob. Je nâen aurais pas demandĂ© davantage, et je me suis quelquefois contentĂ© de moins. Il est vrai que je nâai pas lâhonneur dâĂȘtre le fils dâun patriarche. Joseph se sauve ; il dĂ©tourne ses regards des charmes quâon lui offre. Non, câest lâexpression quâil devrait avoir et quâil nâa point. Il a horreur du crime quâon lui propose. Non, on ne sait ce quâil sent. Il ne sent rien. La femme le retient par le haut de son vĂȘtement. Lâeffort a dĂ©shabillĂ© ce cĂŽtĂ© de sa poitrine, et le dos de la main de la femme touche Ă son sein. Cela est bien cela. Câest une idĂ©e voluptueuse. Monsieur de LagrenĂ©e, qui est-ce qui vous lâa suggĂ©rĂ©e ? Rien Ă dire ni pour la couleur, ni pour le dessin, ni pour le faire. Seulement la tĂȘte de cette femme est un peu dĂ©coupĂ©e. LâĆil droit va lui tomber de son orbite. La partie qui attache en devant son bras gauche au tronc ou la distance de la clavicule au dessous de lâaisselle prend trop dâespace ; le bras ne se sĂ©pare pas assez lĂ . MalgrĂ© ces petits dĂ©fauts, cela est beau, trĂšs beau. Mais le Joseph est un sot ; mais la femme est froide, sans passion, sans chaleur dâĂąme, sans feu dans ses regards, sans dĂ©sir sur ses lĂšvres ; câest un guet-apens quâelle va commettre. Mon ami, tu es plein de grĂąces, tu peins, tu dessines Ă merveille ; mais tu nâas ni imagination ni esprit. Tu sais Ă©tudier la nature, mais tu ignores le cĆur humain.
Sans lâexcellence de ton faire, tu serais au dernier rang. Encore y aurait-il bien Ă dire, sur ce faire. Il est gras, empĂątĂ©, sĂ©duisant ; mais en sortira-t-il jamais une vĂ©ritĂ© forte ? un effet qui rĂ©ponde Ă celui du pinceau de Rubens, de Van Dyck ? Fait-on de la chair vivante, animĂ©e, sans glacis et sans transparents ? Je lâignore et je le demande. »
Informations techniques
Notice #010328