M. et Mme de Cloris aux mains de Saint-Fond (Juliette, II, fig. 16)
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Analyse
Le ministre Saint-Fond, un libertin cruel, a manigancé un complot contre Cloris, à qui il devait pourtant de la reconnaissance, contre sa femme, qui est aussi la cousine de Saint-Fond, et contre leur fille Julie. Ne supportant pas d'avoir des comptes à rendre, il a fait en sorte que la reine elle-même désire leur mort et lui livre cette malheureuse famille. Il organise ensuite un souper avec son bourreau Delcour et Juliette, durant lequel ils les supplicient.
La gravure ne correspond pas exactement à un passage précis du texte, elle condense plutôt plusieurs instants. Cloris à droite est attaché à un « poteau » (Sade, Œuvres III, Pléiade, p. 468), duquel il assistera impuissant au supplice. Face à lui à gauche, sa femme est à genoux sur l'estrade où sa fille est aux mains des libertins. Coupée par la bordure gauche, les mains jointes, elle semble vaguement implorer. Les deux infortunés encadrent le groupe principal, dans lequel Saint-Fond prend Julie, pollue Delcour et regarde Mme de Cloris. Delcour, « armé d'un rasoir, va lentement détacher la tête » (p. 473) de Julie, et regarde Cloris. Le tout forme une petite pyramide de jouissance, récurrente dans les gravures sadiennes. Le texte insiste sur la lenteur avec laquelle les têtes de chaque membre de la famille sont coupées une à une.
La répartition des personnages en trois tableaux peut rappeler la composition des polyptiques sacrés, dont la gravure libertine ferait ici la parodie : Cloris, sa femme et leur fille feraient ainsi, de façon blasphématoire, figure de martyrs. Enfin, une porte fermée se distingue à l'arrière-plan, ce qui ne laisse pas même un semblant d'échappatoire aux victimes.
1. Au-dessus de la gravure à gauche « T. VI. », à droite « P. 219. »
Informations techniques
Notice #013022