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Recherche infructueuse

Supplice de la corde pour la famille Cornélie (Juliette, IV, fig. 36)

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Date :
Entre 1797 et 1801
Nature de l'image :
Gravure sur cuivre
Sujet de l'image :
Enfer 2507 (8)

Analyse

En Italie, Juliette, son amie Olympe, le chef de la police intérieure de Rome Ghighi, et le premier physicien d’Europe, le Comte Bracciani, préparent un plan pour incendier plusieurs hôpitaux de Rome. En attendant de mettre ce plan à exécution, ils organisent des orgies chez Olympe, plus précisément dans « un petit jardin isolé, environné de cyprès » (Sade, Œuvres III, Pléiade, p. 842). Au cours de ces orgies, les libertins en viennent à s'en prendre à la famille d'une certaine Cornélie, arrêtée arbitrairement. Sa famille se compose de son frère Léonard et de leur mère. Après un simulacre d'interrogatoire organisé par Ghighi, la famille est implacablement jugée coupable de crimes qu'elle n'a jamais commis. Les membres de cette famille sont donc longuement torturés avant le supplice final. Celui-ci consiste à être pendu par une corde qui noue ensemble dans le dos les mains et les pieds. La corde étant rattachée à une poulie, les libertins peuvent la faire monter et descendre autant qu'ils le désirent, ce qui provoque un écartèlement progressif dû aux multiples « cabrioles » (p. 846).

C'est précisément la scène illustrée sur la gravure. Bracciani, sur la gauche, actionne une corde reliée au personnage central pendu. Les bouches ouvertes des membres de la famille de Cornélie témoignent de la douleur qu'ils éprouvent, le supplice leur brisant « la poitrine, les reins, les vaisseaux » (ibid.). Ils ne résistent d’ailleurs pas longtemps au supplice, et troueant bientôt la mort. C'est ce qui fait dire au narrateur que « tout décharge » (ibid.), que ce soient les victimes en mourant, les libertins en jouissant, ou le scénario sadien lui-même en s’accomplissant. En-dessous du mécanisme, Ghighi est pollué par Juliette sur les fesses d'Olympe.

Le cadre extérieur que représente l’image est assez inhabituel dans les gravures sadiennes, qui renferment plus généralement les scènes dans des lieux clos. Mais la hauteur des cyprès donne l'impression qu'un vrai mur confine la scène dans le secret, laissant tout juste accès à un bout de ciel.

« — Prisonniers, dit alors le magistrat, en affectant le ton le plus sévère ; vous êtes, je crois, pénétrés de vos crimes… — Nous n’en commîmes jamais, dit Cornélie. — Je crus un moment ma fille coupable ; mais éclairée par ta conduite, je sais maintenant à quoi m’en tenir. — Vous allez le mieux savoir tout à l’heure ; et nous les fîmes à l’instant passer avec nous dans le petit jardin préparé pour l’exécution ; Ghigi leur fit là un interrogatoire dans toutes les formes ; je le branlais pendant ce temps là. Vous n’imaginez pas l’art avec lequel il les fit tomber dans tous les pièges qu’il leur tendait…
    […] On les attache à la fin tous trois, aux cordes qui vont leur donner la mort : quinze cabrioles consécutives leur brisent bientôt la poitrine, les reins, les vaisseaux ; au dixième, l’enfant de Cornélie se détache, et tombe sur les cuisses de Ghigi, que je branlais sur les fesses d’Olympe, pendant que Bracciani faisait aller la corde. Tout décharge à ce spectacle, et ce que je remarquai d’affreux, c’est qu’on le poursuivit. Quoique les têtes fussent calmes, aucun de nous n’imagina de demander grâce ; et les coups de cordes se continuèrent jusqu’à ce que les malheureux, qu’on y appliquait, eussent rendu l’âme ; et voilà comme le crime s’amuse de l’innocence, quand ayant pour lui le crédit et la richesse, il ne lui reste plus à lutter que contre l’infortune et la misère. »

Annotations :

1. Au-dessus de la gravure à gauche « T. VIII. », à droite « P. 257. »

Sources textuelles :
Sade, Donatien Alphonse François, marquis de (1740-1814)

Informations techniques

Notice #013664

Image HD

Identifiant historique :
B2983
Traitement de l'image :
Image web
Localisation de la reproduction :
Bibliothèque numérique Gallica, Bibliothèque nationale de France (https://gallica.bnf.fr)