La maison de force : Vespoli exécute le Christ (Juliette, V, fig. 47)
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Analyse
Juliette, qui est en Italie, se rend à Salerne avec ses amies Clairwil et Olympe. Ensemble, elles rencontrent Vespoli, un libertin qui dirige une « maison correctionnelle » (Sade, Œuvres III, Pléiade, p. 1069). Il s'agit en réalité d'une maison de fous. Vespoli les conduit dans « une grande cour plantée de cyprès, dont le vert lugubre donnait, à cette enceinte, toute l’apparence d’un cimetière » avec, au milieu, « une croix garnie de pointes » (p. 1070). Le libertin fait ensuite venir trois pensionnaires pour montrer aux libertines comment il se livre au plaisir dans le secret. Ces trois fous ont chacun la particularité de se prendre pour des figures saintes, ce qui permet à Vespoli de blasphémer autant qu'il le veut : l’un se prend pour Dieu, un autre pour le Christ, et la dernière pour la Vierge Marie. La gravure représente le moment où Vespoli s’en prend à eux.
Celui qui se prend pour le Christ est installé sur une croix de Saint-André avant d'être pris par le libertin pendant qu'il affirme son identité de martyr : « courage, braves Romains, s’écriait la victime, je vous ai toujours dit que je n’étais venu que pour souffrir sur terre ; ne m’épargnez pas, je vous conjure ; je sais bien qu’il faut que je meure en croix ; mais j’aurai sauvé le genre humain » (p. 1072). Simultanément, Vespoli, armé de stylets, lacère les fesses du fou qui se prend pour Dieu et de la folle qui se prend pour la Vierge, tous deux liés à des poteaux. La séquence est l'occasion de réaliser les fantasmes blasphématoires des libertins. Cette trinité de figures sacrées a sa correspondance dans les trois libertines qui, à la manière des trois Grâces, se polluent en observant le supplice. Elles forment un tableau qui répond au premier. Au fond, derrière deux fenêtres à barreaux, deux folles observent ce qui se passe dans la cour. Sur la droite en revanche les fenêtre grillagées à croisillons sont aveugles. L'organisation de l'image en diptyque oppose les regardants à gauche aux regardés à droite, le regard et le sujet de la représentation.
La scène est surmontée d'un clocher d'église à gauche, bien vain face à cette parodie de Passion.
1. Au-dessus de la gravure à gauche « T. IX. », à droite « P. 348. »
Informations techniques
Notice #008173