Dormon au supplice de la roue dentée (Juliette, II, fig. 19)
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Analyse
Le ministre Saint-Fond a fait envoyer à la Bastille les survivants de la famille de Cloris, qu’il a décimée. Il ne reste que les deux sœurs de Mme de Cloris, Faustine et Félicité. Saint-Fond, avec Juliette et Clairwil, organise une orgie dans laquelle il compte supplicier Faustine, Félicité et leurs amants respectifs qu'il est parvenu à retrouver, Dormon et Delnos. Le souper arrive et c'est d'abord Delnos qui est torturé. Puis vient le tour de Dormon qui est supplicié dans une roue avec des piques orientées vers l’intérieur qui lui lacèrent la peau jusqu’à la mort.
C'est ce moment qui est représenté sur la gravure. La roue est mue par « deux vieilles mises en matrones romaines » (Sade, Œuvres III, Pléiade, p. 499). Le second groupe est sur la gauche, et met en scène son amante Faustine. Saint-Fond la prend : elle est étendue sur Clairwil, et forcée de la polluer. Le personnage dont les fesses sont visibles sur la gauche est Delnos : Clairwil lui pétrit les bourses pendant que Juliette lui pique les fesses « à grands coups d'aiguilles » (p. 506). Cette répartition en deux tableaux peut rappeler les polyptyques sacrés, ce qui rend la gravure blasphématoire.
Le supplice de Dormon est de surcroît censé faire jaillir son sang sur les libertins et leurs victimes. Faustine, en voyant cela, « suffoquée par la douleur, elle expire » (ibid.). Ces décharges de douleurs font écho aux décharges de plaisir des libertins qui se repaissent de la souffrance qu’ils infligent. Aucune échappatoire n’est visible sur l’image : les victimes sont promises à la mort. La roue, posée comme un œil géant sur l’image, les surplombe d’ailleurs et semble surveiller leurs mouvements.
1. Au-dessus de la gravure à gauche « T. VI. », à droite « P. 284. »
Informations techniques
Notice #008181