Le jeu du Bil-gou-rout (Voyages imaginaires, Lamékis 3) - Marillier
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Analyse
Lamékis, 6e partie.
Le roi invite Lamékis à « Bil-gou-router » avec la reine. Le « Bil-gou-rout » est un gros rat qu’on lâche au milieu du cercle des joueurs, allongés à plat ventre tête contre tête et bouche ouverte. Le gagnant est celui qui reçoit le rat dans sa bouche. Il cache alors le rat dans le sein d’un autre joueur et demande « Où est le rat ? » au joueur de son choix, qui désigne un autre joueur au moyen d’une bobine nommée « Bul-gil ». S’il a bien deviné où est le rat, il peut emmener la personne de son choix dans un cabinet voisin et lui dire tout ce qu’il lui plaît.
« La reine qui aimoit à la folie le jeu que nous allions jouer, ne nous laissa pas le tems de nous troubler davantage ; on prit ses places. La mienne me mit en face de ma charmante voisine ; je pus la considérer sans obstacles. Dieu, que j’étois heureux ! Le Bil-gou-rout ayant été lâché & fouetté, fit trois tours, & courut enfin se cacher dans la bouche de la reine, qui le prit par les dents, elle en fut transportée. On regarda alors comme un heureux présage, ce hasard, & elle en fut complimentée. Après les feintes faites pour cacher le rat, la reine me choisit pour deviner. Je n’avois que l’inconnue en tête, pouvois-je en nommer une autre qu’elle ? Je lui jetai le Bul-gil (1). Elle le reçut d’un air honteux, qui fit jeter un cri général. O Sinoüis, quelle fut ma joie ! j’avois deviné, il m’étoit permis de la faire lever, de la conduire dans le cabinet, de l’entretenir. Je me conduisis on ne peut mieu d’abord ; mais à peine fus-je seul avec elle, que je me trouvai comme un terme ; je n’eus rien à lui dire, mes yeux seuls parloient, & il ne me fut pas possible de proférer une seule parole.
(1) Boule attachée par une ficelle, afin d’avoir la facilité de la retirer à soi lorsqu’on s’étoit trompé, & qui servoit de preuves pour subir le commandement, parce qu’alors on la gardoit jusqu’à ce qu’on y eût obéi. »
1. Au-dessus du dessin à gauche « lamekis », à droite « n°. 39. »
Légende dans le cartouche sous le dessin « O Sinoüis, quelle fut ma joie ! j’avois deviné. »
2. Gravure après la p. 48 du volume 21 des Voyages imaginaires.
Informations techniques
Notice #012394