Six femmes ayant bu de l’acide (Nlle Justine, 1799, ch11, fig22)

Jérôme, un des moines de Sainte-Marie-Des-Bois, raconte son histoire.
Ses voyages l'ont conduit à rencontrer, à Messine, ses « aimables confrères les bénédictins de la fameuse abbaye de Saint-Nicolas-d’Assena » qui lui ont fait connaître leur « maison » (p. 763). C'est à l'invitation du père Bonifacio, lui-aussi libertin, que Jérôme s'est fait moine. Il fait également la connaissance du supérieur de la maison, Dom Chrysostome, qui « ne jouissait jamais que d’une fille empoisonnée » (p. 765). Pour satisfaire ce penchant, ils en viennent « au point d'en sacrifier six à la fois de cette manière » (p. 770).
La gravure représente cet empoisonnement de six femmes : trois au premier plan se tordent de douleur, pendant que les moines en entreprennent chacun une d'une manière différente, par devant, par derrière et par la bouche. La gravure puise, en partie, dans le répertoire iconographique des massacres : en haut, la parade des maîtres qui jouissent ; en bas, les convulsions des victimes qui expirent. Mais l'opposition et la frontière entre les deux espaces n'est pas si nette ici : aux trois suppliciées du bas correspondent les trois du haut, jusque dans la répétition des postures. De gauche à droite, celle qui est entreprise par la bouche correspond à la femme en bas à droite qui exhibe sa gorge ; celle qui est prise par derrière correspond à la femme du milieu qui élève ses jambes ; et celle entreprise par devant correspond à la femme en bas à gauche qui présente son sexe en écartant les jambes. Les jambes et les regards des trois femmes du bas renforcent ces correspondances. Les trois libertins les scrutent attentivement pendant qu'ils jouissent de celles qu'ils tiennent. La jouissance libertine n'est plus celle d’un sujet jouissant. C'est le tableau entier qui jouit puisque cette jouissance ne s’accomplit comme totalité que par la somme des trois opérations : vaginale, anale et orale.