L'enterrement de madame Montoni (Mystères d'Udolphe, Maradan, 1798)

La scène illustrée se situe au début du quatrième tome. Il s'agit d'un tournant dans le roman, celui de la mort de madame Montoni, la tante d'Emilie, et de son enterrement. Montoni l'avait épousée en la croyant riche. Mais vite désabusé, il l'avait petit à petit conduite au tombeau en la forçant en vain à lui léguer les seules propriétés dont elle disposait, dans le Languedoc. Elle finit par mourir isolée dans une chambre froide du sombre château d'Udolphe, dont les remparts sont visibles au second plan de la gravure, dans l'obscurité. Émilie insiste pour l'enterrer dignement, et Montoni accepte qu'une cérémonie ait lieu « à minuit, à cette heure de silence et de mystère » (Radcliffe, Les Mystères d'Udolphe t. IV, Paris, Maradan, 1798, p. 50).

C'est le moment où le cercueil de madame Montoni est mis en fosse qui a été choisi pour l'illustration. Émilie et sa femme de chambre Annette y assistent en pleurs. Les autres personnages ne sont que des hommes de Montoni chargés de garder le château nuit et jour, comme un repaire de brigands. Sur la droite est présent un religieux qui effectue son office. Dans le texte, il est décrit comme un fantôme :

La figure vénérable du moine, enveloppé de longues draperies blanches, et dont le capuchon, rejeté par-derrière, faisait ressortir une figure pâle, où l'éclat des flambeaux laissait voir l'affliction adoucie par la pitié, et quelques cheveux blancs échappés au ravage du temps (ibid. p. 53).

Seul un flambeau est présent pour éclairer cette scène macabre. Émilie, jeune fille innocente et naïve sans plus désormais aucun parent, ne sait pas encore que les persécutions que Montoni infligeait à sa femme se tourneront désormais contre elle, qui est maintenant la propriétaire des biens que madame Montoni refusait de léguer à son mari.