Orgie chez Gernande (Nlle Justine, 1799, ch15, fig30)
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Analyse
Chez Gernande, les orgies en nombre se poursuivent, avec les membres libertins de sa famille : Bressac, son neveu, le couple d'Esterval, ses cousins, Verneuil, son frère, et Victor, le fils de Verneuil. La pyramide, récurrente dans les gravures sadiennes, atteint ici une de ses représentations les plus abouties. Les cinq libertins, Bressac, Gernande, Verneuil, d'Esterval et Dorothée, sont au sommet, assis sur un « vaste fauteuil à cinq places, construit de manière que ceux qui y sont placés se trouvent dos à dos ». Censé être dressé au milieu du salon, ce fauteuil pentagonal semble posé sur une sorte de lit qui n'apparaît pourtant pas dans le texte. Chaque libertin assis « place un giton entre ses jambes » pendant qu'il manie un autre individu de ses mains : John et Constant y figurent, parmi d'autres individus indiscernables.
Les autres personnages sont disposés autour de cette strate surélevée, pêle-mêle : « un cercle environne ce large fauteuil, en ne laissant qu’un pied d’intervalle entre ce siège et lui. Ceux qui forment ce cercle sont Mmes de Verneuil et de Gernande, Justine, Laurette, Marceline, Cécile, Lili, Rose et les quatre vieilles, qu’on a fait mettre nues ; tous ces malheureux êtres se tiennent par la main. »
Le projet de Gernande est de saigner ces douze femmes pour former « vingt-quatre fontaines, dont les flots rejailliront sur les scélérats placés dans le fauteuil » (p. 924). La forme pyramidale très nette est donc censée renvoyer à une fontaine de sang. Victor, n'étant pas victime mais pas encore tout à fait bourreau, est initié par les libertins : c'est lui qui est chargé par Verneuil de saigner les femmes se tenant la main. Mais n'ayant jamais saigné, il opère maladroitement, ce qui n'est pas sans réjouir Gernande qui voit des flots de sang couler. Victor tourne ensuite autour du cercle pour battre les femmes prêtes à s'évanouir. C'est lui que l'on observe au premier plan à droite, de dos, des verges à la main, sexe dressé, la tête tournée vers la droite, ce qui l'empêche à cet instant de voir sa sœur s'évanouir, à gauche. Elle ne peut retenir sa chute, malgré la main tendue des deux femmes à sa droite et à sa gauche. Cette chute sera suivie par sa mort.
La décharge des libertins est confortée et figurée par la fontaine de sang qui jaillit des incisions pratiquées par Victor : sur l'image, un jet à gauche et un jet à droite, du creux de l'avant-bras des femmes frappées.
1. Au-dessus de la gravure à gauche « T. III. », à droite « P. 353. »
Informations techniques
Notice #001668