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Résumé

Cet article cherche à définir le pouvoir d’image(s) et d’imaginaire propre à la représentation de synthèse et à la description littéraire. L’objectif est de comprendre comment celles-ci ont pu faire du régime du virtuel un moyen d’interroger à l’écran et à l’écrit la nature de la figure, entre matérialisation plastique et évanescence de l’imaginaire. En s’attachant à des exemples précis, il s’agira de mettre en évidence les liens entre image de synthèse et écriture métaphorique, qui convoquent l’une et l’autre l’idée d’un transport réflexif. On approfondira ainsi l’analyse des relations entre littérature et cinéma à partir d’une perspective technologique articulant intérêt pour le travail figuratif et poétique de l’écriture et de la mise en scène filmique.

Abstract

This paper sets out to define the power of image(s) and imagination inherent in synthetic representation and literary description. The aim is to understand how they have been able to use the virtual as a means of questioning the nature of the figure on screen and in writing, between plastic materialization and the evanescence of the imaginary. By focusing on specific examples, we will highlight the links between computer-generated imagery and metaphorical writing, both of which invoke the idea of reflexive transport. In this way, we will deepen our analysis of the relationship between literature and cinema, from a technological perspective that combines an interest in the figurative and poetic work of writing and film directing.

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Références de l’article

Jacques Demange,

L’image de synthèse, imag(in)er la figure

, mis en ligne le 26/06/2024, URL : https://utpictura18.univ-amu.fr/rubriques/numeros/figures-images-figura-antique-aux-theories-contemporaines/limage-synthese

L’image de synthèse, imag(in)er la figure

Le travail métaphorique de la figuration

Introduction

Lorsqu’en 2004, l’actrice Natalie Portman évoquait son interprétation dans Star Wars, épisode I : La Menace fantôme (Star Wars : Episode I – The Phantom Menace, George Lucas, 1999), ses souvenirs étaient principalement marqués par sa difficulté à s’adapter aux techniques du numérique et en particulier aux écrans verts et bleus permettant d’incruster au moment du montage des décors ou des personnages de synthèse : « Au bout d’un moment vous avez l’impression que c’est une sorte de plaisanterie, expliquait l’actrice, parce qu’on vous demande de combattre et de parler à des personnes qui ne sont pas là1 ».

Cette expérience, l’acteur français Gad Elmaleh l’a également connue sur le plateau de tournage des Aventures de Tintin : Le Secret de la Licorne (The Adventures of Tintin : The Secret of the Unicorn, Steven Spielberg, 2011), mais à un niveau différent. Chargé d’interpréter le personnage de Omar Ben Salaad, l’acteur a dû se familiariser avec la technique de la performance capture consistant à jouer ses scènes revêtu d’une combinaison noire sur laquelle sont accrochées des dizaines de petites boules blanches. Ces dernières envoient des signaux à des centaines de caméras accrochées au plafond et reliées à des écrans d’ordinateurs qui scannent les gestes, les déplacements et la démarche de l’acteur pour animer un personnage de synthèse. Pour Elmaleh, la performance capture lui aurait permis de revenir à « l’essence même de son métier d’acteur qui consiste à faire parler son corps2 ».

Ces deux commentaires mettent en évidence le paradoxe attaché à la figure de synthèse et à ses modalités de création. Là où pour Portman, l’image de synthèse se présente essentiellement comme une invention de l’esprit, une entité invisible favorisant chez l’acteur une sensation d’impuissance qui peut apparaître comme un moteur pour son travail de l’imaginaire, Gad Elmaleh envisage son avatar de synthèse comme la possibilité d’exprimer et de révéler quelque chose de l’authenticité de sa présence physique.

Cette ambivalence qui se rattache l’usage des images de synthèse participe de la révélation l’un des principes constitutifs de la représentation cinématographique dont Jacques Aumont a bien rappelé l’ambivalence en évoquant « la double nature mentale de l'image, tantôt fantôme intouchable sur l'écran, tantôt transport d'une image très matérielle défilant dans la cabine » renvoyant à l’idée d’une image « évanescente et intangible » qui ne ferait qu'un sans pour autant se substituer à une seconde, « matérielle, tangible, manipulable et même modifiable3 ». L’image de synthèse s’inscrit directement dans ce rapport entre matérialité (dans l’idée d’une fabrication) et évanescence (propre à la nature du virtuel) qui inscrit la figure projetée sur l’écran dans une zone de mutation constante entre le visible et l’absence de contact effectif. Ce phénomène de mutation permet d’approfondir les rapprochements interdisciplinaires qui ont déjà pu être proposés dans les études consacrées au numérique et, plus particulièrement aux images de synthèse. Car si ces nouvelles technologies ont souvent été rapprochées de l’art pictural4, le processus de transformation qui affecte le régime figuratif de l’image de synthèse nous semble également trouver un écho au sein de la littérature et, d’abord, dans l’opération transformationnelle instituée par le procédé stylistique de la métaphore.

La métaphore ou le temps de l’hallucination. Le fiacre de Madame Bovary

À propos de la technique du « morphing » consistant à modifier numériquement le corps d’un acteur, Réjane Hamus-Vallée parle d'un « montage dans l'image » se substituant au traditionnel « montage des images5 », une modification qui implique une stratification de la composition audiovisuelle et qui n’est pas sans rappeler la logique du souvenir que Julien Gracq décelait dans l’opération de lecture consistant « à replier en plans superposés, comme une pièce d’étoffe, tout ce qui est fourni de matériaux le long d’une série linéaire6 ». L’image de synthèse porte ainsi en elle un espace-temps qui se greffe à la durée filmique tout en préservant son autonomie créatrice. Présente à l’intérieur du plan, tout en demeurant irréductiblement différente, la figure synthétique véhicule une temporalité de l’« après-coup », propre à son inscription après le tournage du film, qui n’est pas sans rappeler la posture du lecteur pris par la temporalité des situations décrites tout en injectant dans leur narration une durée qui lui appartient en propre. Un lien s’établit ainsi entre le travail figuratif engagé par les lettres et celui proposé par le cinéma, permettant de revenir sur certains a priori théoriques.

Ainsi des propos de Georges Sebbag qui dans un article remarquait que, là où l’on « rumine la matière d’un livre », on « hallucine un film », la « durée mentale de l’écrit » n’égalant pas la « durée métaphysique du film » qui, à l’instar de la musique, est « minuté, chronométré […], mobilise l’attention et l’émotion7 ». Ce jugement quelque peu catégorique mériterait que l’on s’y attarde plus longuement. Il s’agit d’abord de remarquer que l’écriture et la lecture ne sont pas totalement étrangères à ce processus de scansion temporelle invitant la figuration littéraire à pénétrer à l’intérieur de ce régime de sensation qui serait propre à l’hallucination.

Parmi les nombreux exemples fournis par la littérature, nous pourrions nous tourner vers le célèbre passage du fiacre de Madame Bovary (Gustave Flaubert, 1857) dans lequel les personnages d’Emma et Léon s’installent. L’égrenage des noms de lieux (« On la vit à Saint-Pol, à Lescule, au mont Gargan, à la Rouge-Mare, et place du Gaillard-bois ; rue Maladrerie, rue Dinanderie, devant Saint-Romain, Saint-Vivien, Saint-Maclou, Saint Nicaise… ») favorise un chronométrage de la lecture, leur multiplication contribuant à confondre le regard du lecteur avec ceux de ces « bourgeois [qui] ouvraient de grands yeux ébahis devant cette chose si extraordinaire en province, une voiture à stores tendus et qui apparaissait ainsi continuellement, plus close qu’un tombeau et ballottée comme un navire8 ». La précipitation qui anime l’énumération de l’écrivain convoque un rythme, une vitesse, qui happe le lecteur, proposant une expérience de la lecture préparant au caractère hallucinatoire de la comparaison visuelle qui conclut ce passage (la transformation du fiacre en tombeau ou en navire9). Cette valeur hallucinatoire qui animerait l’écriture de Flaubert a bien été rappelée par qui remarque que « Dans l’ontologie immanentiste flaubertienne, il n’y a pas de solution de continuité entre le monde visible et le monde des idées, et les hallucinations artistiques ne sont donc pas coupées des perceptions réelles, dans la mesure où l’artiste doit se gorger de sensations avant de les sublimer dans une vision10 ».

Dans le passage convoqué de Madame Bovary, cette vision accompagne très directement la mobilisation perceptive et émotionnelle que Sebbag impute à l’art cinématographique et musicale. Les effets de répétition et de rime (« rue Maladrerie, rue Dinanderie […], Saint-Romain, Saint-Vivien ») expriment une musicalité, tandis que le défilement des lieux participe à la construction d’une forme sérielle qui n’est pas sans rappeler l’enchaînement des photogrammes sur une bande de pellicule.

On retrouve par ailleurs dans ce passage la valeur métaphysique de Sebbag imputait à la durée du film. Car la structure rythmique qui anime l’écriture de Flaubert n’a pas seulement pour but de mobiliser l’attention du lecteur mais également de figurer la présence d’une seconde série d’événements invisibles mais que le rythme précipité de l’énumération parvient à rendre visibles. En se focalisant sur l’itinéraire du fiacre, l’écrivain omet sciemment de décrire l’action qui se déroule à l’intérieur de la voiture : la consommation de la relation amoureuse d’Emma et de Léon. Seuls certains éléments permettent d’entre-apercevoir cet événement. Ainsi de l’allusion à la « main nue » d’Emma jetant depuis la fenêtre de la voiture « des déchirures de papier, qui se dispersèrent au vent et s’abattirent plus loin, comme des papillons blancs, sur un champ de trèfles rouges tout en fleur11 ». Là encore, la comparaison permet de souligner la valeur visuelle qui nourrit le style de Flaubert. Le fiacre transformé en cercueil ou en navire, tout comme les morceaux de papier métamorphosés en papillons blancs insistent sur la présence d’un second niveau de visible et de lisible contenu à l’intérieur du régime figuratif de l’écriture. Ce second niveau de sens ne s’oppose pas au premier mais se nourrit au contraire de celui-ci. La précision topographique qui guide la narration du roman dans ce passage invite à se détacher progressivement de la description de l’itinéraire pour porter son esprit sur l’événement qui se joue entre les lignes. C’est dans cette perspective que Jacques Rancière avait pu expliquer que cet art de la précision qui caractérise l’écriture du romancier ne cherche pas « à ancrer l’histoire […] dans la réalité vécue mais au contraire à l’en séparer, à fixer dans le cours du temps, un point à partir duquel une séquence temporelle spécifique s’autonomise12 ».

C’est en ce sens que ce passage de Madame Bovary peut être qualifié de « métaphorique » car renvoyant à l’idée générale d’un transport figuratif qui apparaît au fur et à mesure de la lecture comme une dynamique créative et autonome. Jean Cléder rappelle en effet que « l’appellation même » de la métaphore « désigne le mécanisme de la figure comme un processus, un déplacement ; la figuration du mouvement exige un mouvement de figuration, et en ce sens toute image est d’abord un processus imageant – image mobile13 ». De fait, chez Flaubert, la mobilité est double : la description du mouvement du fiacre s’accompagne du mouvement qui anime la description, transportant le texte de la simple localisation d’un itinéraire à l’émergence d’images qui lui sont a priori étrangères mais qu’il participe malgré tout à faire apparaître (tombeau, navire, papillons). L’écriture retrouve ainsi le processus imageant que Cléder met en lien avec le processus de figuration, mais propose également une réflexion sur l’articulation qui s’établit à l’intérieur même de ce processus. Car c’est bien dans cette double-mobilité qu’agit le processus de figuration métaphorique. De la mobilité qui anime la description du trajet du fiacre à la mobilité du style, l’écriture métaphorique prend une dimension indéniablement transitoire. Il n’est en ce sens pas anodin que ce passage soit justement situé entre le premier et le second chapitre de la troisième partie du roman, jouant donc un rôle essentiel dans la structuration du récit. La mobilité de la métaphore dépasse ainsi le seul cadre de la figuration stylistique ou descriptive pour s’inscrire dans le domaine de la syntaxe.

Il est intéressant de constater que c’est justement cette fonction syntaxique qu’ont principalement retenu les premières adaptations cinématographiques du roman de Flaubert. Alors que celle de Jean Renoir (1933) met en scène ce moment à travers une série de plans courts représentant le trajet du fiacre qui se conclut par un fondu au noir, celle de Vincente Minnelli (1949), tout en reprenant ce procédé de transition, substitue à la représentation du fiacre un plan montrant Emma et Léon s’enlacer à travers le reflet brisé d’un miroir. Dans les deux cas, le fondu au noir marque la valeur de ponctuation qui se rattache à ce passage. Mais par ailleurs, ce procédé technique tire son importance de sa propre fonction figurative qui se rattache directement à sa valeur plastique. Nicole Brenez remarque en effet que : « le rôle plastique du noir – simultanément obscurité du motif, fondu au noir, montage en négatif et cerne plastique -, sera donc de restituer l’intervalle technique qui fonde la possibilité même du film, mais surtout de figurer la façon dont l’image toujours s’arrache au néant et reste une émergence continue14 ». C’est ce travail de restitution qui nous semble d’abord important de relever. Le fondu au noir participe ainsi à la révélation de l’ossature technique du film, c’est-à-dire la machinerie à l’origine de son pouvoir de figuration. De même que chez Flaubert, la scansion des lieux participait à mettre en relief le rôle de la syntaxe (et en particulier celui de la ponctuation à travers l’usage du point-virgule séparant et reliant à la fois la mention des rues et des domaines) dans la composition du rythme de la description, les adaptations cinématographiques du roman font de la valeur conclusive du fondu au noir un moyen de faire voir l’ossature technique à l’origine du développement de la figure visuelle qui prend forme à l’écran. Par ailleurs, le fondu relève bien de ce que Brenez considère comme un rapport ontologique à l’image, oscillant entre la sensation de l’émergence et l’arrachement du néant, qui rappelle la dualité entre visible et invisible évoquée par Aumont. Une autoréflexivité se rattache ainsi au procédé technique, aspect bien souligné par Christian Metz qui remarquait que si « les images du film ont pour référents des objets, les effets optiques ont pour référents, en quelque sorte, les images elles-mêmes15 ». À sa suite, Hélène Vally note que « les effets visuels métamorphosent l’image de façon interne en l’affectant directement […] : ils accroissent l’existence d’un monde peuplé de doubles en craquelant et en travaillant la surface de l’image16 ».

Ce craquellement de la surface se constitue comme l’une des composantes essentielles du travail figuratif engagée par l’image cinématographique mais également par l’écriture littéraire. Sur ce point, si l’adaptation de Minnelli semble s’éloigner le plus clairement du roman de Flaubert en éludant totalement le passage du fiacre, il s’en rapproche de façon peut-être plus fondamentale par le truchement du motif du miroir fêlé sur lequel se projette la figure du couple formé par Emma et Léon. La fissure qui divise et entache la composition, annonçant la négation de l’image provoquée par le fondu au noir, renvoie au procédé de défiguration à l’œuvre dans la description de Flaubert. Car si l’énumération des lieux suscite bien une sensation de redoublement (voire de dédoublement phonétique par l’effet de rime employé par l’écrivain), elle provoque également un effet d’émiettement et de désagrégation propre au travail de la métaphore qui constitue sa signification à partir d’une transformation de l’apparence et donc d’une défiguration du sens. Comme chez Minnelli la fissure du miroir inscrit au cœur même de la composition du couple sa rupture à venir, chez Flaubert, les morceaux de papier jetés par la fenêtre font état du déchirement intérieur qui prend forme à travers le mouvement apparent de la voiture. C’est ici que se joue la complexité de la figuration hallucinatoire de la métaphore qui se caractérise principalement par sa discontinuité : inscription de l’indescriptible à l’intérieur du lisible, de la déformation à l’intérieur de la composition, de la stase à l’intérieur de la durée.

Dans le cas du fondu au noir, le procédé technique récupère bien à son compte le procédé de la métaphore, oscillant entre la figuration plastique et la défiguration narrative, contribuant à l’émergence de la tâche tout en engloutissant les personnages et les décors. Mais de la métaphore, le fondu retient également l'impact temporel. Metz considérait ainsi que « certaines “ponctuations” cinématographiques, surtout lorsqu’elles sont lentes et que le souci du dosage et de l’attente s’y marque fortement » relèvent de « procédures de voilement-dévoilement17 » propre à un double-souci de monstration et de soustraction, de déshabillement et d’habillement de l’espace comme de la figure.

Porté par une valeur d’attente et de dilatation, le fondu au noir inscrit dans le projet figuratif du film une manière de rumination qui rappelle celle que Sebbag décelait au sein du travail littéraire. Le fondu au noir met ainsi en relief la dimension métaphorique qui se rattache à l’effet optique, traçant souterrainement un lien entre l’écriture cinématographique et l’écriture littéraire qu’invite à prolonger les nouvelles technologies du numérique.

Écartement

Avant de pousser plus loin notre analyse de ce lien, il convient de revenir sur la portée esthétique de la métaphore et ses enjeux théoriques dans la considération de la figure visuelle. Pour Martin Heidegger, la valeur métaphorique de la figuration relèverait ainsi d’une métaphysique :

[L]a notion de « transposition » et de métaphore repose sur la distinction, pour ne pas dire la séparation, du sensible et du non-sensible comme deux domaines subsistant chacun pour soi. Une pareille sensibilité entre le sensible et le non-sensible, entre le physique et le non-physique est un trait fondamental de ce qui s’appelle « métaphysique » et qui confère à la pensée occidentale ses traits essentiels […]. C’est pourquoi la métaphore est souvent utilisée comme moyen auxiliaire dans l’interprétation des œuvres poétiques ou, plus généralement, artistiques. Le métaphorique n’existe qu’à l’intérieur des limites de la métaphysique18.

Pour reprendre notre précédent exemple, remarquons que dans la description de Flaubert, deux types de transposition cohabitent : le transport du fiacre qui passe d’un lieu à l’autre et le transport de la comparaison qui associe différentes figures pour proposer un second itinéraire, souterrain, qui prend forme à l’intérieur de cette distinction entre le « sensible et le non sensible », le « physique et le non-physique ». Le caractère évanescent qui détermine la transformation de la voiture et que redouble le motif du papillon virevoltant dans les airs, rappellent la nature virtuelle qui se rattache au régime figuratif de la métaphore. Et c’est justement ici que cette dernière entretient un lien avec le caractère métaphorique qui appartient à l’image de synthèse. En se greffant dans la prise de vue réelle, celle-ci fait voir l’évanescent qui bat à l’intérieur de la matérialité constitutive des figures cinématographiques. On revient ici à l’ambivalence entre le « sensible » et le « non-sensible » que nous distinguions dans l’appréhension de l’image de synthèse par les acteurs invités à interagir avec elle. Pure virtualité ou moyen de véhiculer l’authenticité d’une présence corporelle, l’image de synthèse exprimerait la physique d’un imaginaire, soit la métaphysique d’une figuration. Comme la métaphore, l’image de synthèse se définirait ainsi comme un acte de transfiguration autonome qui soutient et participe au travail figuratif du texte ou du film.

Cette autonomie créative s’affirme clairement dans les premiers usages de l’image de synthèse au cinéma où sa présence se limite au générique d’introduction (l’animation d’une chouette de synthèse dans Labyrinthe [Labyrinth, Jim Henson, 1986], d’un logo dans Superman [Richard Donner, 1978]) ou n’apparaît que sous la forme d’une image diffusée sur un écran (Les Rescapés du Futur [Futurworld, Richard T. Heffron, 1976] ; Star Wars, épisode IV : Un nouvel espoir [Star Wars, George Lucas, 1977]). En voyant sa figuration délimitée par le surcadrage ou occuper un espace limitrophe de la fiction, l’image de synthèse fait tout à la fois voir les marques de son ancrage dans le plan et sa différence ontologique.

Une valeur comparative intervient ainsi dans l’inscription de la forme synthétique à l’intérieur du plan filmique. Le surcadrage qui accompagne sa présence assure cette idée de comparaison qui la distingue et l’associe aux autres figures de l’écran. À la fin des années soixante-dix et dans les années quatre-vingt, l'effet numérique s'apparente à un élément transitif relié de façon plus ou moins concertée au contexte narratif du film et dont l'apparition relativement brève assure la valeur événementielle tout en suscitant un effet de distance.

C’est justement à travers cette distanciation, qu’un nouveau lien s’opère entre le mode de lecture induit par les images de synthèse et l’écriture de Flaubert. Dans le passage de Madame Bovary, en effet, l’absence marquée de l’héroïne entrave le processus d’identification précédemment mis en œuvre par le roman. Emma disparue, ou plutôt camouflée à l’intérieur de la voiture, le lecteur n’a d’autre choix que de se laisser guider par la seule force événementielle de l’action décrite. Celle-ci dépend de ce que Rancière a nommé « l’écriture flaubertienne des petites perceptions accolées » propice à l’instauration d’une « expérience auditive et visuelle minimale » reposant sur une articulation « entre l’humain et l’inhumain » (le sentiment amoureux et la sensation de mouvement du fiacre) pour faire de « l’irreprésentable » le « langage même par lequel la fiction esthétique s’est opposée à la fiction représentative19 ». La réflexion de Rancière fait écho aux propos de Juliette Azoulai sur les œuvres fictionnelles de Flaubert qui « mettent en scène un mouvement de l’imagination qui n’est pas sans évoquer Taine, à travers un brouillage systématique des limites entre intériorité et extériorité, entre illusion et réalité20 ».

Pour Christian Metz, c’est justement dans ce tiraillement brouillant et entravant le phénomène d’identification que se trouve annoncée la singularité du cinéma vis-à-vis des autres arts figuratifs. « À quoi s’identifie le spectateur durant la projection du film ?21 », s’interroge ainsi Christian Metz. Il y a d’abord, bien sûr, le personnage de fiction créé par le scénario et incarné par la technique dramatique de l’acteur. Mais, comme le souligne très justement le sémiologue, « le cinéma s’écarte du théâtre sur un point important […] : il nous présente souvent de longues séquences que l’on pourrait dire (littéralement) "inhumaines" – […] – des séquences où apparaissent seulement des objets inanimés, des paysages, etc., et qui, durant parfois des minutes entières, n’offrent aucune forme humaine à l’identification spectatorielle22 ». De plus, remarque Metz, « l’identification à la forme humaine apparaissant à l’écran, lors même qu’elle a lieu, ne nous dit encore rien quant à la place du Moi spectatoriel dans l’instauration du signifiant23 ». En fait, pour Metz, durant la projection cinématographique, le spectateur s’identifierait à lui-même « comme pur acte de perception (comme éveil, comme alerte) : comme condition de possibilité du perçu et donc comme à une sorte de sujet transcendantal, antérieur à tout il y a 24». Aussi l’identité du spectateur, entendu comme un sujet percevant, se confondrait-elle avec la nature du mécanisme cinématographique, toutes deux déterminées par le double mouvement de projection et d’introjection :

Lorsque je dis « je vois » le film, écrit Metz, j’entends par là un singulier mélange de deux courants contraires : le film est ce que je reçois, et il est aussi ce que je déclenche, puisqu’il ne préexiste pas à mon entrée dans la salle et qu’il me suffit de fermer les yeux pour le supprimer. Le déclenchant, je suis l’appareil de projection, le recevant je suis l’écran ; dans ces deux figures à la fois, je suis la caméra, dardée et pourtant enregistreuse25.

Plusieurs éléments doivent nous interpeller ici. D’abord, cette définition du spectateur comme « sujet transcendantal » qui n’est pas sans rappeler la fonction de la métaphore qui dépasse la logique narrative pour la transcender vers un nouveau réseau de sens et de sensations. Mais dans le cadre de notre réflexion, c’est surtout la mention des « séquences littéralement "inhumaines" » qui nous intéresse. Si Metz convoque des paysages ou des objets comme exemples, les images de synthèse s’inscrivent dans cette inhumanité, se présentant, tout du moins dans leurs premiers usages, comme des représentations sans véritable velléité anthropomorphique.

La chose se vérifie en effet si l’on se tourne vers l’ensemble des productions ayant participé à l’essor des images de synthèse au cinéma. Celles-ci ne sont jamais employées pour représenter des formes humaines mais des animaux (les dinosaures de Jurrassic Park [Steven Spielberg, 1993]), des créatures extra-terrestres de forme aqueuse (Abyss [James Cameron, 1988]) ou encore des motifs échappés de vitraux (le chevalier du Secret de la pyramide [Young Sherlock Holmes, Barry Levinson, 1985]) et des humanoïdes, soit de simples décalques de formes humaines (Les Rescapés du futur ; Terminator 2 [James Cameron, 1991]).

À l’instar de la métaphore, l’image de synthèse s’affirme comme une figure complexe, parcellaire, ambivalente et symbolique au sens où l’entend Metz :

[L]e symbolique, au cinéma comme ailleurs, n’arrive à se constituer qu’à travers et par-dessus les jeux de l’imaginaire : projection-introjection, présence-absence, fantasmes accompagnateurs de la perception, etc. Même acquis, le Moi repose encore, par en dessous, sur les figures fabuleuses grâce auxquelles il a été acquis, et qui l’ont marqué durablement au sceau du leurre26.

La grande fréquence de séquences humainement inhabitées provoquée par les premières utilisations des techniques du numérique rend sensible cet aspect. Les remarques de Metz sur la localisation du symbolique (« par-dessus » ; « par en dessous ») réactivent par ailleurs l’importance de la valeur de transition que nous avions évoquée à propos des premiers usages de l’image de synthèse et ainsi que de l’écart que Heidegger relevait dans la constitution de la métaphore. Pour Paul Ricœur, en effet, le « lieu [de la métaphore] dans le langage, se trouve entre les mots et les phrases27 », à l’intérieur de cet écartement « entre la lettre et le sens virtuel28 », pour configurer un espace discursif intérieur qui se propose de redéfinir l’acception générale de la figure à partir de l’écartement qui la fonde.

Figurer par l’abstraction

Au cinéma, l’image de synthèse semble rejouer ce paradoxe de la figure qui, selon Pierre Fontanier, appartiendrait en propre au discours littéraire :

Le mot figure n’a dû d’abord se dire, […], que des corps, ou même que de l’homme et des animaux considérés physiquement et quant aux limites de leur étendue. Et, dans cette première acception, que signifie-t-il ? Les contours, les traits, la forme extérieure d’un homme, d’un animal, ou d’un objet palpable quelconque. Le discours, qui ne s’adresse qu’à l’intelligence de l’âme, n’est pas, même considéré quant aux mots qui le transmettent à l’âme, par les sens, un corps proprement dit. Il n'a donc pas de figure, à proprement parler. Mais il a pourtant dans ses différentes manières de signifier et d’exprimer, quelque chose d’analogue aux différences de forme et de traits qui se trouvent dans les vrais corps. C’est sans doute d’après cette analogie qu’on a dit par métaphore les figures du discours. Mais cette métaphore ne saurait être regardée comme une vraie figure, parce que nous n’avons pas dans la langue d’autre mot pour la même idée29.

La métaphore et l’image de synthèse contribueraient ainsi communément à la révélation de la dualité autant qu’à la duplicité à l’origine du discours figuratif de la littérature et du cinéma. Si les mots d’un roman et les images d’un film se proposent bien de tracer les contours de formes extérieures « d’un homme, d’un animal, ou d’un objet », elles ne peuvent restituer leur palpabilité. Vraie ou fausse figure, la métaphore et l’image de synthèse se proposent d’incarner la continuité de la forme par la virtualité, insistant donc sur la relativité qui façonne leur travail de figuration : « Figurer […], c’est toujours voir comme, mais ce n’est pas toujours voir ou faire voir30 » nous rappelle Ricœur.

Le cadre cinématographique comme le texte littéraire apparaît comme composite, doublé, accueillant simultanément une représentation photo-réaliste et son versant synthétique, la description réaliste et un signifié virtuel. Or, on l’a dit, le régime virtuel ne s’oppose pas ici au régime réaliste, mais en rappelle le principal déterminisme de création, comme la présence d’un élément extérieur viendrait révéler la structure moléculaire d’un organisme en en altérant la composition.

Sans s’en départir, le rôle joué par l’image de synthèse et la métaphore dépasse alors l’horizontalité successive du langage et la redite verticale ou transversale du texte écrit, pour atteindre au statut de « figure » essentielle. Symbole de la spatialité du film « dans son rapport au sens », métaphore et productions de synthèse relient les régimes d’images, pour assurer le « voir comme », c’est-à-dire la transparence de la figure, révélant la figurabilité du style à l’œuvre.

Penser le régime virtuel comme force agissante à l’intérieur de l’acte de figuration nous renvoie au processus du figural qui, comme le rappelle Jacques Aumont, déporte la valeur de l’image de sa « capacité plus ou moins fonctionnelle » (le voir ou le faire voir) pour la faire exister « sur un mode matériel et dans un dispositif qui impose sa présence propre », renvoyant à une fonction « d’évocation, voire de présentification, de l’immatériel et de l’invisible31. » (le voir comme).

Ce travail d’évocation ou de présentification de l’immatériel et de l’invisible nous renvoie à la problématique développée par Jean-François Lyotard dans son ouvrage Discours, figure.

Pour le philosophe, « entre l'opposition et la différence, il y a la différence de l'espace du texte à l'espace de la figure. Cette différence n'est pas de degré, elle est constitutive d'un écart ontologique, les deux espaces sont deux ordres du sens, qui communiquent, mais qui par conséquent sont séparés. Il faut dire plutôt espace textuel qu'espace du texte, espace figural qu'espace de la figure32. » C'est donc par sa relation avec le texte (dans notre cas filmique ou littéraire) que la figure produit son propre espace de sens, que Lyotard se propose de nommer « figural ». Cet espace entretient avec celui du texte un « écart ontologique » qui n'est pas sans rappeler celui de l’image de synthèse et de la prise de vue réelle.

L'espace du texte correspond en effet à « l'espace où s'inscrit le signifiant graphique » (espace cinématographique ou textuel), tandis que l'espace figural dépasse la seule « propriété relative au rapport de l'objet plastique avec ce qu'il représente » pour se déporter du côté de l' « organisation du signifiant » qui s'articule autour du rapport entre deux pôles, la «  lettre » et la « ligne33 ». La première est « le support d'une signification conventionnelle […] [qui] s'efface derrière ce qu'il soutient : la lettre ne donne lieu qu'à la reconnaissance rapide, au bénéfice de la signification34 ». Nous sommes ici dans le domaine d'une représentation conventionnelle où le signifiant et le signifié ne font qu’un. La ligne, quant à elle, se réclame d'une nature biface : « par une face, elle se prête à la production de sons et de rythmes, elle tend à se régler sur leur puissance mélodique ou métrique pour engendrer du sens, de l'expression. Mais elle est, par l'autre face, entièrement domestiquée aux exigences de la signification et cantonnée à son espace plat ». Cette organisation duelle présente donc une certaine ambiguïté, touchant tout à la fois à « une énergétique » et à « une écriture ». L'expression qui en résulte tire donc sa puissance de « deux exigences contradictoires, celle de la signification articulée et celle du sens plastique35. » Le figural apparaît alors lorsque la ligne se donne plus à voir qu'elle n'est reconnaissable, échappant ainsi au règne de la figuration significative.

Nos précédents exemples illustrent ce basculement. La métaphore comme l’image de synthèse contribuent à la révélation du travail de l’écriture tout en perturbant la logique narrative pour souligner sa valeur interne, plastique. Les transformations de la métaphore, la composition de l’image de synthèse s'apparente alors au tracé d'une ligne dévoyant les règles scripturales du cadre-texte, la virtualité du mouvement exprimé désignant et détournant à la fois ses limites en affirmant la présence de tracés souterrains et originaires. Cette importance conférée à la plasticité dans le travail figural de la métaphore et de l’image de synthèse permet de repenser la figure qui dépasse le seul ordre du reconnaissable (principe figuratif) pour se donner à voir à travers l’instauration d’une configuration interne propre au processus d’écriture et de composition.

C’est ici que le « transport » propre à la métaphore apparaît comme un signe proprement signifiant, c’est-à-dire valant par sa propre mobilité plastique qui se caractérise par la constance de ces mutations. La métaphore partage sur ce point la nature fuyante et indocile de l’image de synthèse qui, selon Alain Bonfand, « se modifiant à volonté et à distance de l'espace et distance du temps […] peut n'être pas exhibée, mise en sommeil, apparaître différente de ce qu'elle fut36». Un double-phénomène d’invisibilité et de mutation relie ainsi l’image de synthèse à la métaphore. Il ne s’agit plus dès lors d’exposer l’écart, mais de l’incarner, de le figurer pleinement.

Conclusion – Un retour aux origines

Il nous faut cependant encore comprendre la nature de cette figuration paradoxale. Un indice pourrait se trouver inscrit en creux dans les pages de De la grammatologie de Jacques Derrida à travers son concept de la « différance » qui correspond à :

[L]a trace (pure) […]. Elle ne dépend d’aucune plénitude sensible, audible ou visible, phonique ou graphique. Elle en est au contraire la condition. Bien qu’elle n’existe pas, bien qu’elle ne soit jamais un étant-présent hors de toute plénitude, sa possibilité est antérieure en droit à tout ce qu’on appelle signe (signifié/signifiant, contenu/expression, etc.), concept ou opération, motrice ou sensible37.

La « différance » ne serait « donc pas plus sensible qu’intelligible et elle permet l’articulation des signes entre eux à l’intérieur d’un même ordre abstrait – […] – ou entre deux ordres d’expression. » Cette articulation se fonde sur celle « de la parole et de l’écriture – au sens courant – comme elle fonde l’opposition métaphysique entre le sensible et l’intelligible ». Derrida conclut ainsi : « il ne peut y avoir de science de la différance elle-même en son opération, non plus que de l’origine de la présence elle-même, c’est-à-dire d’une certaine non-origine », remarquant alors que « la différance est donc la formation de la forme38 ».

Image de synthèse et métaphore inscrivent bien un régime de figuration différent à l’intérieur du travail figuratif de l’écriture. Mais loin de se limiter à un simple travail de redoublement ou de décomposition, ce processus participe à recouvrir la figure pour en dévoiler les origines. Pour illustrer ce phénomène, nous pourrions nous tourner vers un autre exemple littéraire. Dans sa nouvelle « Le chef-d’œuvre inconnu » (1831), Balzac décrit la peinture réalisée par un artiste qui, croyant avoir su insuffler la vie à son sujet, révèle une toile abstraite, une « espèce de brouillard sans forme » à l’intérieur duquel apparaît « le bout d’un pied nu qui sortait de ce chaos de couleurs, de tons, de nuances indécises39 ». Ce pied, qui nous rappelle d’abord la « main nue » d’Emma Bovary échappée du cadre de la fenêtre, est moins le vestige d’une figure qui aurait été recouverte par la couleur, que l’un des éléments du travail de l’informe qui soutient toute production figurative. L’ « espèce de brouillard » qui se répand sur la toile pourrait ainsi apparaître comme la métaphore du travail de la métaphore, soit de cette vapeur qui s’empare de la figure, la transforme, pour la révéler à sa virtualité en même temps qu’à sa partialité de représentation : fragment d’un état du corps et du monde.

La dynamique métaphorique mise en scène dans cet extrait n’est pas sans rappeler certains usages récents de l’image de synthèse au cinéma. Ainsi de Under the Skin (Jonathan Glazer, 2013) qui s’ouvre sur la composition d’un œil de synthèse, sphère blanche surmontée d’un cercle noir, sur laquelle se superpose une voix prononçant d’abord des mots inarticulés, puis composant progressivement des phrases. C’est le langage qui prend forme, coïncidant avec la naissance d’une figure qui n’apparaît d’abord que sous la forme d’un élément anatomique imprécis, superposition de formes géométriques et monochromatiques, avant d’apparaître à travers le corps de chair et de sang de l’actrice Scarlett Johansson.

La figure de l’actrice n’a pas pour but de faire disparaître l’informe de synthèse, mais bien de le recouvrir sans en estomper totalement la présence. Supposée composer l’enveloppe charnelle d’une forme extraterrestre assouvissant ses instincts primaires en attirant dans son domaine de jeunes hommes, le corps de l’actrice apparaît comme une sorte de palimpseste. Cette idée concernera en fait l’ensemble des figures humaines qui traversent le film. Pris au piège dans une étrange salle noire recouverte d’un sol réfléchissant, les victimes s’enfoncent progressivement dans un liquide visqueux et opaque. À l’intérieur de cet espace souterrain, oscillant entre le liquide et le solide, le film représente ces corps en train de se décomposer progressivement, leur peau flétrissant, les traits de leur visage se distendant. La figure s’évide pour laisser apparaître son envers : une surface ondulante et abstraite, un aplat de synthèse dont les contours se fondent dans le cadre.

Comme dans la nouvelle de Balzac, l’identification d’un élément anatomique (ici un pied, là un œil) invite moins à recomposer la silhouette d’une figure incomplète qu’à découvrir le processus à l’origine du régime figuratif de toute image : la métaphore, soit la transformation d’une matière qui, le temps d’une séquence ou d’une description, remonte à la surface du cadre et de la page pour déstabiliser, et ainsi transcender, les catégories du visible et du lisible.

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Notes

1

Propos tenus dans l’émission télévisée Inside the Actors Studio (Bravo, 21/11/2004).

2

Propos rapportés par Philippe Manche dans un entretien avec Jamie Bell : « Jamie Belle "Tintin est un personnage très complexe" », Le Soir, 26/10/2011, article publié en ligne et consultable sur : https://www.lesoir.be/art/jamie-bell-tintin-est-tres-complexe-_t-20111026-01MVR5.html [dernière consultation le 12/01/2023].

3

Jacques Aumont, Que reste-t-il du cinéma ?, Paris, Librairie Philosophique J. Vrin, coll. « Philosophie et cinéma », 2012, p. 79.

4

Ainsi de Thomas Elsaesser pour qui : « l'“opacité” du pixel numérique est plus proche de l'opacité du pigment de la peinture que l'un et l'autre de la photographie. » (« Entre savoir et croire. Le dispositif cinématographique après le cinéma », in François Albera et Maria Tortajada [sous la direction de], Ciné-dispositif. Spectacles, cinéma, télévision, littérature, Lausanne, L'Âge d'Homme, 2011, p. 65 ; ou de Dominique Willoughby, pour lequel : « Le traitement des images, la retouche, l'étalonnage, le montage, les opérations de post-production, désormais numériques ont favorisé une "picturalisation" accrue du film », in Le cinéma graphique. Une histoire des dessins animés : des jouets d'optique au cinéma numérique, Paris, Textuel, Paris, 2009).

5

Réjane Hamus-Vallée, Les effets spéciaux, Paris, Cahiers du cinéma, Collection « les petits Cahiers », 2004, p. 87 (c'est nous qui soulignons).

6

Julien Gracq, En lisant en écrivant, Paris, Éditions Corti, coll. « Rien de commun », 1980, p. 213. La métaphore de la pièce d’étoffe proposée par Gracq entre par ailleurs en résonance avec la comparaison proposée par Laurent Jullier et Cécile Welker entre la conception des images de synthèse et le métier à tisser (voir Laurent Jullier et Cécile Welker, Les images de synthèse au cinéma, 2e édition, Paris, Armand Colin, coll. « Focus cinéma », 2017).

7

Georges Sebbag, « Les durées filmiques », in. Leutrat Jean-Louis (sous la direction de), Cinéma & Littérature. Le grand jeu, t. 2, Cherbourg, De l’Incidence Éditeur, 2011, p. 162.

8

Flaubert Gustave, Madame Bovary. Mœurs de Province (1856), Paris, Librairie Générale Française, coll. « Le Livre de Poche », 2019, p. 362.

9

Rappelons que pour Gérard Genette, le « caractère hallucinatoire » des rêveries d’Emma Bovary renvoie plus généralement à ce qu’il nomme « la pathologie Bovaryste » (voir : Gérard Genette, Figures I, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Tel Quel », 1966 p. 225).

10

Juliette Azoulai, L’Âme et le Corps chez Flaubert. Une ontologie simple, Paris, Classiques Garnier, coll. « Études romantiques et dix-neuviémistes », 2014, p. 236.

11

Gustave Flaubert, Madame Bovary. Mœurs de Province, op. cit., p. 362.

12

Jacques Rancière, Les bords de la fiction, Paris, Éditions du Seuil, coll. « Essais », 2017, p. 157.

13

Jean Cléder, Entre littérature et cinéma. Les affinités électives. Échanges, conversions, hybridations, Paris, Armand Colin, coll. « Cinéma/Arts visuels », 2012, p. 16.

14

Nicole Brenez, De la figure en général et du corps en particulier. L’invention figurative du cinéma, Paris/Bruxelles, De Boeck, coll. « De Boeck Université », 1998, p. 317-318.

15

Christian Metz, Essais sur la signification au cinéma. Tomes I et II, Paris, Klincksieck, coll. « Esthétique », 2003, p. 173.

16

Hélène Vally, « "Par delà le mur optique". Ou le flou comme désir de magie », Imaginaire, n° 8, 2011, article disponible en ligne sur : https://journals.openedition.org/entrelacs/238 [dernière consultation le 09/02/2023].

17

Christian Metz, « Le signifiant imaginaire », Communications, n°23, 1975, p. 54.

18

Martin Heidegger, Le Principe de raison (trad. Préau André), Paris, Éditions Gallimard, coll. « Tel », 1957, p. 126.

19

Jacques Rancière, Le destin des images, Paris, La Fabrique éditions, 2003, p. 141-142 (c’est l’auteur qui souligne).

20

Juliette Azoulai, L’Âme et le Corps chez Flaubert. Une ontologie simple, op. cit., p. 237.

21

Christian Metz, Le signifiant imaginaire. Psychanalyse et Cinéma, Paris, Christian Bourgois Éditeur, 1984, p. 66 (c’est l’auteur qui souligne).

22

Ibid., p. 67.

23

Ibid., p. 67-68.

24

Ibid., p. 69 (c’est l’auteur qui souligne).

25

Ibid., p. 72 (c’est l’auteur qui souligne).

26

Ibid., p. 73.

27

Paul Ricœur, La métaphore vive, Paris, Éditions du Seuil, coll. « L’ordre philosophie », 1975, p. 171.

28

Ibid., p. 189.

29

Pierre Fontanier, Les Figures du discours (1830), Paris, Flammarion, 1968, p. 63 (c’est l’auteur qui souligne).

30

Paul Ricœur, La métaphore vive, op. cit., p. 83.

31

Jacques Aumont, L’Image, 3e édition, Paris, Armand Colin, coll. « Cinéma/Arts visuels », 2011, p. 273-274.

32

Jean-François Lyotard, Discours, figure, Paris, Éditions Klincksieck, coll. « D'Esthétique », 1971, p. 211 (c'est l'auteur qui souligne).

33

Ibid. (c'est l'auteur qui souligne).

34

Ibid.

35

Ibid. , p. 215-216.

36

Alain Bonfand, « Postface », in Gaëtan Picon, 1863. Naissance de la peinture moderne, Paris, Éditions Gallimard, 1988, p. 233.

37

Jacques Derrida, De la grammatologie, Paris, Les Éditions de Minuit, coll. « Critique », 1967, p. 92 (c’est l’auteur qui souligne).

38

Ibid.

39

Honoré de Balzac, « Le chef-d’œuvre inconnu » (1831), repris in Le chef-d’œuvre inconnu, Pierre Grassou et autres nouvelles, Paris, Éditions Gallimard, coll. « Folio Classique », 1994, p. 66.

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