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Résumé

Dans leur tentative de « restituer » l’Antiquité, les humanistes de la Renaissance se sont notamment passionnés pour les motifs iconographiques antiques qui leur sont apparus comme des « symboles », appréhendés à la fois à partir des textes anciens et de vestiges retrouvés (monnaies, sculptures, intailles, camées…). Leur réflexion sur le terme symbolon montre qu’ils y voient une forme de langage figuré qui leur apparaît tout à la fois comme une langue d’initiés quasi-sacrée, qu’ils s’efforcent cependant de percer, et comme une ressource artistique, littéraire, poétique mobilisable pour de nouveaux enjeux. Le symbole de l’ancre et du dauphin, utilisé par le Vénitien Alde Manuce comme marque d’imprimeur, interprété par Érasme dans l’adage Festina lente comme la manifestation de « l’empire » d’Alde Manuce sur la culture européenne, montre comment l’érudition humaniste s’empare de ces formes symboliques pour exprimer ses propres préoccupations.

In their attempt to "restore" Antiquity, Renaissance humanists were particularly fascinated by ancient iconographic motifs, which appeared to them as "symbols", apprehended both from ancient texts and rediscovered relics (coins, sculptures, intaglios, cameos...). Their reflections on the term symbolon show that they see in it a form of figurative language that appears to them both as a quasi-sacred language of initiates, which they are nevertheless striving to break through, and as an artistic, literary and poetic resource that can be mobilized for new issues. The symbol of the anchor and the dolphin, used by the Venetian Aldus Manutius as a printer's mark and interpreted by Erasmus in the adage Festina lente as the manifestation of Aldus Manutius' "empire" over European culture, shows how humanist erudition seized on these symbolic forms to express its own concerns.

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Références de l’article

Anne-Hélène Klinger-Dollé,

Le symbole, objet privilégié de la « restitution de l’Antiquité » par les humanistes de la Renaissance : l’exemple de l’ancre et du dauphin

, mis en ligne le 03/09/2024, URL : https://utpictura18.univ-amu.fr/rubriques/ressources/images-reception-lantiquite/symbole-objet-privilegie-restitution-lantiquite

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Ressources externes

Le symbole, objet privilégié de la « restitution de l’Antiquité » par les humanistes de la Renaissance : l’exemple de l’ancre et du dauphin

Le mouvement humaniste, qui s’amorce dès le Trecento en Italie avec des figures comme Pétrarque ou Boccace, et dont l’historiographie actuelle voit les prolongements jusqu’au début du XVIIe siècle, se caractérise avant tout par le rôle fondamental qu’y joue le « retour à l’antique », autrement dit une forme de réception de l’Antiquité1. Une des expressions privilégiées par les acteurs mêmes de ce mouvement est celle de « restituer l’Antiquité ». Dans le vocabulaire de l’époque, ce n’est pas tant prétendre, comme l’expression le signifierait en français aujourd’hui, reconstituer méthodiquement une image la plus précise et complète possible du monde antique, que revendiquer de rendre l’Antiquité à son éclat passé, en la sauvant des injures supposées des siècles antérieurs, dans un attachement souvent patriotique au passé et un rapport polémique à la culture médiévale.

Étudier la « restitution de l’Antiquité » des humanistes à travers leur passion pour le symbolisme antique

Cette « restitution » passe par de nombreux travaux savants qui peuvent paraître difficiles d’accès pour des élèves de l’enseignement secondaire. Il est néanmoins un champ qu’on peut aborder de manière fructueuse et plaisante en classe : les symboles antiques. Ce prisme permet d’aborder simultanément des textes et des images ; on peut ainsi mobiliser la sensibilité littéraire et artistique des élèves, aiguiser leur sens de l’observation et les initier à une forme d’herméneutique stimulante.

Quel sens de « symbole » pour cette étude ?

Le sens pertinent dans le contexte de la Renaissance est avant tout celui d’« objet sensible, fait ou élément naturel évoquant, dans un groupe humain donné, par une correspondance analogique, formelle, naturelle ou culturelle, quelque chose d’absent ou d’impossible à percevoir »2. Deux aspects de cette définition sont à souligner : le symbole vaut dans « un groupe humain donné ». Or loin de considérer l’Antiquité comme un monde définitivement révolu, les humanistes pensent partager avec les Égyptiens, les Grecs ou les Romains une même humanité et pouvoir ainsi reprendre à leur compte leurs symboles et en actualiser la signification. Le deuxième aspect est la « correspondance analogique » postulée entre l’élément sensible concret et la signification qu’il est censé recéler. Alors que « symbole » dans la langue contemporaine peut désigner des signes qui représentent autre chose par pure convention (le symbole mathématique ou chimique), les humanistes sont convaincus que les symboles antiques sont toujours motivés par des correspondances analogiques fondées dans la réalité.

Des sources antiques et des productions humanistes qui mêlent textes et images

De nombreux humanistes s’intéressent à des symboles antiques. Leurs sources sont bien sûr textuelles. Mais s’y ajoutent aussi des sources iconographiques, à mesure que l’on collecte et étudie l’iconographie des monnaies antiques, le décor qui accompagne certaines inscriptions, les vestiges de reliefs sculptés, le petit mobilier archéologique tels que camées*, intailles*, vases, lampes… Cet intérêt se concrétise par des investigations érudites, des créations littéraires et artistiques alimentées par ces recherches3. On peut observer comment cette passion permet une meilleure connaissance de l’Antiquité tout en contribuant à la création d’un imaginaire, au prix d’erreurs d’interprétation. Il s’agit d’« erreurs fécondes » néanmoins, dans la mesure où elles permettent l’éclosion de formes littéraires et artistiques originales. Jean Guillemain s’est intéressé à l’une de ces méprises dans la plastique de la Renaissance, dans un domaine qui ne relève pas du symbolisme : il s’agit de la mode du « médaillon à l’antique », orné d’une tête de profil. Cet ornement sculpté, inspiré des profils monétaires, n’est en réalité pas fréquent dans les bas-reliefs antiques4.

Le symbolon antique : une riche constellation de sens

Certains textes humanistes mettent en évidence la richesse anthropologique, littéraire et esthétique de ce que l’Antiquité a compris comme relevant du « symbole »5. Le commentaire des termes grecs symbolè et symbolon donné par le premier grand helléniste français, Guillaume Budé, dans ses Commentaires de la langue grecque (1529), part ainsi de sens concrets liés à des pratiques sociales caractéristiques du monde antique. Il s’agit du tesson de céramique, coupé en deux moitiés, dont le rapprochement sert à authentifier le porteur comme ayant des liens d’hospitalité avec le détenteur de l’autre moitié. Le terme peut aussi désigner le mot de passe entre initiés dans les cultes à mystères, la contribution apportée par chacun pour la célébration d’un repas communautaire au sein d’une confrérie religieuse ou encore les enseignes militaires. Mais la notion antique de symbole se déploie également sur le terrain rhétorique, philosophique et littéraire. Elle est en effet proche de la figure de style appelée allegoria dans les traités de rhétorique antique, qui consiste à produire un énoncé à double sens, concret et caché. Cette allégorie rhétorique doit être à la fois distinguée et mise en relation avec la démarche herméneutique que l’on désigne par l’expression de « lecture allégorique », laquelle consiste à prêter à un texte une signification seconde, dissimulée ; certains courants philosophiques (stoïciens, néoplatoniciens) en font un usage important dans leur lecture des grands textes poétiques et mythiques.

Dès l’Antiquité, et durant tout le Moyen Âge, le christianisme s’est intéressé aux mythes et fictions poétiques païens par le prisme de la lecture allégorique. Il a aussi développé ses propres conceptions du symbole. Il n’est ainsi pas étonnant que Budé s’appuie sur un écrivain à l’autorité encore très reconnue à la Renaissance : Denys l’Aréopagite. Sa « théologie symbolique » prétend donner la clé de nombreux symboles contenus dans les Écritures bibliques et la liturgie chrétienne, dans une démarche paradoxale (mais typique), puisqu’il vulgarise des secrets prétendument réservés aux initiés. Mais le paradigme antique par excellence du symbole est à chercher ailleurs : Budé donne une place de choix aux hiéroglyphes égyptiens. Ceux-ci suscitent un véritable engouement à travers toute l’Europe lettrée, alors même que leur réception par l’humanisme est fondée sur un contresens. Ils sont en effet compris comme une écriture faite uniquement d’idéogrammes, un langage sacré fondé sur l’image, échappant à l’arbitraire des signes verbaux ; ils seraient le réceptacle d’une sagesse universelle. Les humanistes ne connaissent que peu d’inscriptions hiéroglyphiques concrètes. Les formes qu’ils font circuler comme s’il s’agissait de hiéroglyphes sont parfois empruntées à des vestiges sculptés romains. Elles s’appuient surtout sur une source textuelle tardive, écrite en un temps où les hiéroglyphes égyptiens ne sont plus compris dans leur valeur originelle : les Hieroglyphica, attribués à un certain Horapollon, dont le nom même laisse entendre la charge imaginaire attachée à ce texte. Retrouvé en 1419, ce texte circule sous forme manuscrite dans l’Italie du Quattrocento, dépourvu d’image. Il fait par la suite l’objet d’éditions imprimées illustrées. Il en inspire aussi d’autres, dont le plus célèbre est l’Hypnerotomachia Poliphili (Songe de Poliphile), d’un mystérieux Francesco Colonna. Cette fiction magistrale, publiée en 1499 par le grand éditeur vénitien Alde Manuce (1449-1515), est illustrée de très nombreuses gravures qui jouent un rôle clé dans le roman. Le lecteur du Songe de Poliphile se voit confronté à plusieurs « pseudo-hiéroglyphes ». Ce sont autant d’énigmes qui supposent, pour être déchiffrées, des clés que le roman ne donne que partiellement. Formes et significations proposées par cette fiction vont se mêler à d’autres sources textuelles et formelles antiques pour alimenter l’imaginaire symbolique des écrivains et artistes de la Renaissance.

Un exemple de symbole antique réinterprété à la Renaissance : l’ancre et le dauphin

Cet exemple a l’intérêt de partir d’une source iconographique. Il s’agit du revers d’un denier d’argent émis sous l’empereur Titus, dont la tête laurée figure à l’avers avec l’inscription Titus Caesar Vespasianus Augustus Pontifex Maximus (« Titus César Vespasien Auguste Grand Pontife »)6. Nous savons par Érasme que l’humaniste et collectionneur vénitien Pietro Bembo en possédait un exemplaire : c’est par lui qu’Érasme a pu voir cette monnaie. Or l’imprimeur Alde Manuce donne une grande notoriété à ce motif. Il le choisit, en effet, comme marque d’imprimeur, c’est-à-dire comme une sorte de logo commercial, qui figure sur la page de titre et sert à identifier les livres sortis de son officine (fig. 1).
 

Fig. 1. Page de titre de l’édition des Adages d’Érasme, Venise, Alde Manuce, 1508. Exemplaire reçu par l’humaniste Beatus Rhenanus de l’imprimeur strasbourgeois Matthias Schürer en 1511 (Bibliothèque humaniste de Sélestat K 1007).
Fig. 1. Page de titre de l’édition des Adages d’Érasme, Venise, Alde Manuce, 1508. Exemplaire reçu par l’humaniste Beatus Rhenanus de l’imprimeur strasbourgeois Matthias Schürer en 1511 (Bibliothèque humaniste de Sélestat K 1007).

C’est Érasme (env. 1467-1536) cependant qui donne à cette association de signes graphiques une signification approfondie. Il les mobilise en effet pour éclairer l’adage antique Festina lente, qu’il place en tête de la deuxième chiliade (deuxième millier) d’adages, dans l’édition des Adages très enrichie qu’il publie en 1508 chez le même Alde Manuce. Ce texte, d’une quinzaine de pages dans l’édition bilingue récente parue aux Belles Lettres, est un véritable essai avant la lettre7.

Selon le principe même des Adages, Érasme donne d’abord l’expression figurée, le prouerbium qu’il va commenter : Festina lente, et son équivalent grec : Σπεῦδε βραδέως (Speude bradeôs). Puis il en commente l’origine supposée dans les textes de l’Antiquité. Il en propose aussi diverses applications possibles dans des contextes rhétoriques variés. Le commentaire s’autorise plusieurs digressions volontaires : un éloge dithyrambique de l’entreprise intellectuelle et commerciale d’Alde Manuce, doublé d’une diatribe contre les mauvais imprimeurs.

D’emblée, Érasme souligne les qualités rhétoriques remarquables de l’adage : il s’agit d’un oxymore, qui allie brièveté et caractère énigmatique. Il propose, pour cette raison, d’en user comme d’une devise (insignia), ce qui dans le langage de la Renaissance signifie l’association d’une représentation figurée et d’une sentence qu’un individu choisit pour le représenter ou exprimer une ligne de conduite fondamentale. Érasme suggère que ses contemporains pourraient y recourir et l’intégrer dans le décor d’édifices ou sur des objets de pouvoir (anneaux de prélats, sceaux, sceptres). C’est alors qu’il réinterprète véritablement le symbole antique figurant sur la monnaie de Titus. Le sens qu’il avait à l’époque de Titus ne nous est pas connu de manière explicite ; on peut penser qu’il est en relation avec l’idée de domination, notamment maritime. Les motifs iconographiques des revers de monnaie peuvent être compris comme véhiculant un message politique qui célèbre le souverain mis en valeur à l’avers8. Mais Érasme, comme d’autres humanistes, projette sur l’iconographie monétaire antique la pratique contemporaine des médailles que commanditent des artistes ou érudits de la Renaissance. Sur l’avers de ces médailles figure le profil de l’individu à l’origine de la commande, au revers sa « devise », symbole graphique et sentence associés. C’est ainsi qu’Érasme pense pouvoir interpréter le revers du denier de Titus comme une traduction en image de l’adage Festina lente. À l’appui de sa lecture, il cite un chapitre des Nuits attiques d’Aulu-Gelle9, lequel explique combien l’empereur Auguste prenait Festina lente comme une sentence appropriée à l’homme politique, lui prescrivant d’allier détermination et prudence. Érasme, décrit comme suit le revers du denier : « une ancre, dont le milieu ou vergue est enveloppé par un dauphin qui l’embrasse »10. Il introduit immédiatement après le terme de symbolum et l’associe à l’écriture énigmatique des hiéroglyphes : « Or que cette forme de symbole ne signifie rien d’autre que le mot d’ordre de l’empereur Auguste Σπεῦδε βραδέως, les lettres hiéroglyphiques, témoins du passé, en sont la preuve »11.

Érasme, dans la suite de l’adage, indique deux grandes voies pour résoudre les « énigmes » du langage hiéroglyphique, et cela est vrai du symbolisme antique en général : la connaissance des propriétés naturelles des choses et l’ensemble des « disciplines libérales » héritées des Anciens. Il prétend ainsi décrypter le symbole de l’ancre entourée d’un dauphin par sa connaissance de l’animal (qu’il tire en réalité des livres sur les animaux d’Aristote ou d’Oppien) et à la lumière de différents passages de Virgile, Suétone et Aulu-Gelle qui prônent une forme d’équilibre entre fermeté d’action et sage préméditation. Il s’appuie aussi sur de supposés hiéroglyphes égyptiens : un cercle, une ancre et le dauphin – séquence tirée du Songe de Poliphile – qu’il interprète comme une formule augmentée de la sentence : « Toujours, hâte-toi lentement » (Ἀεὶ σπεῦδε βραδέως, Aei speude bradeôs), le cercle exprimant l’idée d’éternité (fig. 2).
 

Fig. 2. Inscription en pseudo-hiéroglyphes dans l’Hypnerotomachia Poliphili (Songe de Poliphile) de Francesco Colonna, Venise, Alde Manuce, 1499. BnF, RES G-Y2-41, f. 22 r°.
Fig. 2. Inscription en pseudo-hiéroglyphes dans l’Hypnerotomachia Poliphili (Songe de Poliphile) de Francesco Colonna, Venise, Alde Manuce, 1499. BnF, RES G-Y2-41, f. 22 r°.

Érasme met en avant deux aspects fascinants de ces images hiéroglyphiques : leur grande aura (dignitatis plurimum), liée à leur ancienneté, leur origine sacrée et leur exotisme, et le plaisir non négligeable (uoluptatis non parum) qu’occasionne leur déchiffrement pour l’interprète. Car il y a une forme de jouissance herméneutique, sensible à la lecture de l’adage, à faire converger divers témoignages des Anciens. Il y a aussi une satisfaction intellectuelle à actualiser l’adage antique. Ainsi pour Érasme, la récupération de ce symbole comme marque par Alde Manuce donnerait à voir la domination intellectuelle d’un homme du livre, acteur de la nouvelle culture humaniste, alors que dans l’Antiquité, le symbole célébrait le pouvoir politique et militaire d’un empereur. Que les armes le cèdent à la presse !

Un jeu entre culture pour « initiés » et invention de nouvelles significations

Comme on le voit à travers l’exemple de l’ancre et du dauphin, l’humaniste, mais aussi le lecteur jouent le rôle valorisant d’interprète de ce langage symbolique, connu des initiés. Les études humanistes consacrées à ces formes symboliques, abondantes, furent dans un premier temps dépourvues d’images, du moins dans les livres imprimés, pour des raisons notamment financières et techniques. À mesure que le coût des gravures diminue, les représentations figurées se multiplient dans le livre imprimé, ce qui permet par ricochet à ce langage symbolique de se diffuser de plus en plus dans la peinture, la sculpture ou les arts décoratifs. Festina lente se retrouve ainsi sur les plafonds de palais, dans les livres d’emblèmes, quitte à adopter d’ailleurs d’autres formes graphiques (association de la flèche et du rémora, poisson connu pour arrêter la navigation des bateaux, ou encore d’une voile gonflée et d’une tortue)12.

Pour le lecteur d’aujourd’hui, retrouver les clés de ces « énigmes » demande une initiation certes exigeante. Il est cependant possible d’étudier avec les élèves la présence de quelques motifs récurrents : Fortune, la corne d’abondance, « Hercule Gaulois », les symboles de pietas que sont la cigogne ou Énée portant Anchise13. On s’intéressera à leur circulation sur différents supports, dans des contextes et milieux différents, et à leur resémantisation. Ce « jeu » initie au fonctionnement du symbole, de l’allégorie et de l’énigme. Il permet aussi d’observer la tension qui s’instaure entre le désir de s’inscrire dans un symbolisme culturel partagé, en sollicitant des formes et des sens déjà admis, et l’envie de surprendre, de créer du neuf, de déplacer les significations. Car il y a une forme de « tour de passe-passe » dans ces pratiques humanistes sur le symbolisme antique : sous couvert de tirer leur caution de l’Antiquité, elles réinventent souvent leur objet en fonction de préoccupations collectives ou purement personnelles. L’humaniste est ainsi comme l’écrivain qui prétend dévoiler le sens allégorique d’un texte et qui, selon la formule d’Anne Rolet, « s’efforce de couvrir sous la loi naturelle le caractère arbitraire et conventionnel de sa démarche, que sous-tend généralement une ambition : plier l’objet étudié aux exigences de ses propres convictions doctrinales »14.

Pour aller plus loin

Marie Platon (CPGE Lycée Saint-Sernin de Toulouse) et Pierre-Jean Faudot proposent des pistes d’exploitation pédagogique de cet article sur Imago. Lire du latin illustré. On y trouvera aussi des extraits significatifs de l’adage 1001 « Festina lente » en bilingue.

ÉRASME DE ROTTERDAM, Les Adages, dir. Jean-Christophe Saladin, Paris, Les Belles Lettres, 2011, adage 1001 « Festina lente », vol. 1, p. 1-17.

KLINGER-DOLLÉ, Anne-Hélène, dir., Dossier Restituer l’Antiquité à la Renaissance : entre érudition et créativité imaginative, Anabases 17, 2013, p. 43-162, https://journals.openedition.org/anabases/4065. En particulier les articles qui abordent des questions iconographiques (Bruno TOLLON, « Le château de Bournazel, l’Antiquité retrouvée », Jean GUILLEMAIN « L’invention de la numismatique : des arts décoratifs aux sciences auxiliaires de l’histoire », Ginette VAGENHEIM, « Pirro Ligorio (1512-1583) et les véhicules antiques »).

KLINGER-DOLLÉ, Anne-Hélène, ressources pédagogiques en ligne sur le site Imago. Lire du latin illustré autour de la devise Festina Lente. Dossier étoffé pour l’enseignement supérieur : https://imago-latin.fr/superieur/poemes-illustres/emblemes-alciat/et page pédagogique pour le secondaire : https://imago-latin.fr/secondaire/litterature/festina-lente/.

LAURENS, Pierre, introduction à André ALCIAT, Emblemata. Les Emblèmes, Paris, Les Belles Lettres, 2016, p. ix-xxxvii.

ROLET, Anne, dir., Allégorie et symbole, voies de dissidence ? De l’Antiquité à la Renaissance, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2012.

Notes

1

Sur le concept de « réception de l’Antiquité », voir l’introduction à ce dossier.

2

Premier sens donné dans le deuxième grand ensemble de définitions du mot « symbole » par le Centre national de ressources lexicales et textuelles.

3

Voir ainsi l’étude de Charles Davoine « Peindre les ruines antiques à la Renaissance : enjeux d’un genre nouveau »*, dans le présent dossier.

4

Voir son article « L’invention de la numismatique : des arts décoratifs aux sciences auxiliaires de l’histoire », Anabases 17 (2013), https://journals.openedition.org/anabases/4116#text (consulté le 08/06/2023).

5

Toute cette section s’appuie sur l’introduction d’Anne Rolet au volume collectif Allégorie et symbole, voies de dissidence ? De l’Antiquité à la Renaissance, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2012 et à son édition des Questions symboliques d’Achille Bocchi. Symbolicae quaestiones, 1555, Tours, Presses Universitaires François Rabelais / Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015, 2 volumes.

6

On peut voir l’avers et le revers de ce dernier sur un site marchand de monnaies antiques : https://www.cgb.fr/titus-denier-ttb,brm_386421,a.html.

7

L’adage 1001 est maintenant facilement accessible : Érasme de Rotterdam, Les Adages, dir. Jean-Christophe Saladin, Paris, Les Belles Lettres, 2022, vol. 2, p. 1-17. On se méfiera cependant de la traduction des termes symbolum, insignia, prouerbium, dictum… qui tiennent trop peu compte à notre avis de l’épaisseur sémantique de ces termes sous la plume d’Érasme. Nous proposons les extraits les plus significatifs de ce texte en bilingue sur le site Imago. Lire du latin illustré (voir à la fin de cet article la rubrique « Pour aller plus loin »).

8

Nous renvoyons à l’article de Guillaume de Méritens sur l’iconographie monétaire*, dans le dossier « Images antiques ».

9

Livre X, chap. 11.

10

ancoram, cuius medium ceu temonem delphin obuolutus complectitur (Les Adages, éd. cit., p. 4). Nous retraduisons.

11

Id autem symboli nihil aliud sibi velle quam illud Augusti Caesaris dictum, speude bradeos, indicio sunt monumenta litterarum hieroglyphicarum (ibid.).

12

On en trouvera des exemples sur le site Imago. Lire du latin illustré, page pédagogique sur Festina lente : https://imago-latin.fr/secondaire/litterature/festina-lente/.

13

Voir notre étude de cas « Symboles antiques dans les Emblèmes d’Alciat »* et les nombreux exemples, illustrés, donnés sur le site Imago. Lire du latin illustré, dans la rubrique « Emblèmes d’Alciat » : https://imago-latin.fr/superieur/poemes-illustres/emblemes-alciat/ou dans la partie « Secondaire », la page consacrée à Hercule Gaulois https://imago-latin.fr/secondaire/vie-politique/empire/hercule-gaulois/.

14

Anne Rolet, Allégorie et symbole, op. cit., p. 28.

DOSSIER :
DANS LE MÊME NUMÉRO

Images et réception de l'Antiquité

En guise d'introduction

Réception de l’Antiquité aux XVe-XVIIIe siècle

Réception de l’Antiquité aux XIXe-XXIe siècle